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L’Ukraine engage la bataille contre les oligarques

Il n’y a pas d’oligarques en Ukraine. C’est du moins ce que les intéressés entendent faire croire. Depuis que le président, Volodymyr Zelensky, a fait adopter une loi, le 23 septembre, visant à réduire leur influence tentaculaire, tous nient appartenir à cette caste d’hommes d’affaires richissimes, accusés d’exploiter sans scrupule l’économie du pays, de corrompre le système politique et d’utiliser les médias pour leur seul profit.

Cette loi les hérisse tellement que même Rinat Akhmetov, l’homme le plus riche de l’ex-république soviétique avec un patrimoine estimé à 7,3 milliards d’euros, a accepté de rompre avec sa discrétion légendaire pour mettre les choses au point. « Je suis un investisseur, pas un oligarque », soutient au Monde ce magnat de la sidérurgie qui possède plusieurs chaînes de télévision et est réputé contrôler une large fraction des députés du Parlement. « Si nécessaire, je suis prêt à défendre mon nom devant les tribunaux ukrainiens et internationaux », prend-il soin de préciser par écrit.

Moins puissant et fortuné, le multimillionnaire Vasyl Khmelnytsky est, lui aussi, régulièrement qualifié d’oligarque. Cet ancien député, installé au cœur de l’immense parc d’innovation technologique qu’il est en train de construire à Kiev, s’en défend tout autant. « De toute façon, dans ce pays, à chaque fois que vous faites quelque chose qui déplaît à quelqu’un, on vous appelle comme ça. Je ne fais pas attention », jure-t-il. A la fin de l’entretien, tout de même, il s’inquiète : « Votre article sera neutre ou plutôt négatif ? »

Soucieux de leur réputation

Pour ces hommes, rien n’est plus important que leur réputation, sous peine de devenir indésirables aux yeux des marchés financiers et des banques à l’étranger. Or, cette loi, unique dans l’espace post-soviétique, vise justement à les étiqueter publiquement comme oligarques – une appellation infamante. Ces derniers ont jusqu’à mars 2022 pour se défaire de leurs liens avec le monde politique et vendre leurs médias. Sinon, leur nom figurera sur une liste établie par le Conseil de sécurité nationale et de défense, un organe dirigé par le président. Il leur sera alors notamment interdit de financer des partis politiques et de participer à la privatisation de grandes entreprises. Le texte oblige également les fonctionnaires à déclarer tout contact avec eux.

« Les noms de famille n’ont pas d’importance : Medvedtchouk, Kolomoïsky, Porochenko, Akhmetov, Pintchouk, Firtach ou n’importe qui d’autre », avait clamé, en avril, le président, en énumérant les noms des plus grands oligarques du pays. « Ce qui compte, c’est de savoir si vous êtes prêts à travailler dans la légalité et la transparence, ou si vous voulez continuer à créer des monopoles, contrôler les médias, influencer les députés et les fonctionnaires. La première solution, nous la soutenons. La seconde, c’est terminé », lançait alors, martial, l’ancien comédien, élu avec 73 % des voix, le 21 avril 2019, sur sa promesse de lutter contre la corruption.

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