France World

L’impossible départ des mineurs échoués à Ceuta

Par Sandrine Morel

Publié aujourd’hui à 05h00

Réservé à nos abonnés

ReportageLe territoire espagnol espère le retour vers le Maroc d’un millier d’enfants et d’adolescents venus du royaume.

Du parc Santa Catalina de Ceuta, promontoire rocheux dominant la mer et battu par le vent, les contours du rocher de Gibraltar et de la péninsule espagnole se dessinent clairement de l’autre côté du détroit, à 14 kilomètres à peine à vol d’oiseau. Arafa, 16 ans, arrivé dans l’enclave espagnole le 18 mai, quand plus de 10 000 Marocains ont traversé la frontière en moins de quarante-huit heures, porte son regard à l’horizon. Sa famille sait-elle qu’il se trouve ici ? « Ce sont mes parents qui m’ont dit d’aller chercher un avenir meilleur en Europe », répond le garçon, originaire de Tétouan, à 40 kilomètres plus au sud.

Avec cinq autres compagnons de voyage, ils grelottent de froid, en cette fin de journée du 2 juin, en attendant un voisin qui leur a promis de la nourriture. Si, après des jours passés à éviter la police, Arafa erre dans les rues de Ceuta, vivant de la solidarité des habitants, plutôt que de se rendre dans un des centres aménagés pour les mineurs isolés, c’est qu’il craint d’être « renvoyé au Maroc », dit-il. Son objectif : traverser le détroit « n’importe comment, dans un bateau gonflable ou dans un ferry, caché sous une voiture ou même dans un camion à ordures… », explique-t-il avec un sourire enfantin.

Lire aussi L’Espagne au cœur de la géopolitique migratoire en Méditerranée Des migrants, pour la plupart marocains, font la queue à la frontière pour recevoir de la nourriture chez la bénévole Sabah Hamed (à gauche), et pour obtenir un rendez-vous au bureau d’asile (à droite). Ceuta, le 2 juin 2021. BERNAT ARMANGUE / AP POUR « LE MONDE »

Près de trois semaines ont passé depuis l’entrée de milliers de Marocains à Ceuta, après un relâchement délibéré du contrôle de la frontière par le Maroc, dans un contexte de crise diplomatique entre Madrid et Rabat. Brahim Ghali, le chef du Front Polisario, mouvement qui milite pour l’indépendance du Sahara occidental, dont l’hospitalisation en Espagne pour le guérir du Covid-19 avait été le détonateur de la crise, est reparti, mercredi 2 juin, en Algérie, à bord d’un avion médicalisé. Mais tout indique que son départ ne suffira pas à apaiser les tensions entre les deux pays. « La crise ne se limite pas à la question d’un homme, ne commence pas à son arrivée ni ne s’achève avec son départ », avait précisé Rabat, dans un communiqué la veille.

Si près de 8 000 migrants ont été refoulés, selon les autorités espagnoles, des centaines d’autres sont parvenus à échapper à la police, en se cachant dans la ville et ses collines. Dans les rues, on reconnaît les nouveaux arrivés au sac plastique qu’ils tiennent à la main pour seul bagage. Sur le bord de la route qui descend du mont Hache, certains se lavent sommairement à une fontaine. L’immense majorité des 1 100 mineurs non accompagnés recensés depuis ont été accueillis dans des structures d’accueil aménagées en urgence. La question de leur retour au Maroc tourne néanmoins au casse-tête.

Il vous reste 68.88% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Source

L’article L’impossible départ des mineurs échoués à Ceuta est apparu en premier sur zimo news.