La crise au sein de l’exécutif couvait depuis plusieurs semaines. Les tensions n’avaient fait que croître entre le président de gauche, Pedro Castillo, et son ex-ministre de l’intérieur, Avelino Guillen, ex-procureur anticorruption et figure publique respectée, connu pour son rôle dans les procès contre l’ex-autocrate Alberto Fujimori (1990-2000).
A l’origine de la rupture : des désaccords sur la nomination à des postes clés de la police nationale, et la demande ignorée de M. Guillen de révoquer le commandant général, sur fond de soupçons de corruption. Une crise de confiance qui a également entraîné le départ de l’ex-première ministre, Mirtha Vasquez, militante des droits humains et de l’environnement, précipitant l’annonce de M. Castillo, lundi 31 janvier, de renouveler entièrement son cabinet, pour la seconde fois depuis son arrivée au pouvoir fin juillet 2021.
Mais le cabinet présenté mardi soir fait déjà l’unanimité contre lui, à gauche comme à droite : il est débarrassé de ses figures de la gauche progressiste, dépourvu de figure politique majeure et sans atout à faire valoir, comme l’était l’ex-ministre de l’économie, l’économiste de gauche modéré Pedro Francke. En poste depuis le début de la présidence de M. Castillo, il se présentait comme le garant de la stabilité économique du pays ayant su rassurer les investisseurs, paniqués par l’arrivée d’une gauche dite « radicale » au pouvoir.
Rejet croissant de l’exécutif
Cette fois, le gouvernement de Castillo opère un virage vers le conservatisme social. L’annonce du choix du nouveau premier ministre, Hector Valer, député élu en avril 2021 au Congrès sous l’étiquette du parti ultraconservateur Renovacion Popular – avant de s’en séparer pour se positionner au centre –, et membre de l’Opus Dei, a dérouté dans les rangs de la gauche. La révélation par la presse, mercredi, qu’il avait été dénoncé pour avoir commis des violences contre son épouse et sa fille, a soulevé l’indignation de collectifs féministes et de parlementaires, qui ont exigé son départ.
Autre poste controversé, celui de la ministre des femmes et des populations vulnérables, Katy Ugarte, une enseignante de 50 ans, dont les propos réactionnaires sur l’approche du genre ont douché les derniers espoirs des progressistes. Divers collectifs féministes ont mis en garde contre un clair « recul dans la lutte pour l’égalité ».
Avec ce nouveau cabinet, Pedro Castillo tente pourtant de sauver sa présidence. En six mois à la tête du pays, il a réussi à mécontenter une large part de l’opinion publique, l’opposition et une partie de ses soutiens. Les enquêtes d’opinion témoignent d’un rejet croissant de l’exécutif. Un sondage de l’Institut des études péruviennes, diffusé dimanche, indique que 61 % des sondés désapprouvent le gouvernement, un des pires scores en six mois. Manque de réformes majeures, manque de cap, valse ministérielle et une image de président distant, taiseux et énigmatique, qui n’inspire pas la confiance : telles sont les principales critiques à son encontre.
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