Depuis son élection, le 25 novembre 2021, à la présidence d’Interpol, une épée de Damoclès pesait sur le général Ahmed Naser Al-Raisi. Cette incertitude est désormais levée : une nouvelle plainte a été déposée mardi 18 janvier contre l’officiel émirati pour « torture » et « actes de barbarie » auprès du pôle des crimes contre l’humanité du Parquet national antiterroriste (PNAT), à Paris.
Deux précédentes plaintes, déposées en 2021, avaient été classées sans suite par le parquet pour absence de compétence, notamment parce qu’à l’époque, M. Al-Raisi n’était ni présent ni résident en France. Ce n’est plus le cas. Comme en atteste une photo postée le 17 janvier sur Twitter par Jürgen Stock, le secrétaire général d’Interpol, M. Al-Raisi est bien présent en France, où il a pris ses fonctions au siège lyonnais de l’organisation internationale.
La plainte déposée mercredi l’a été par l’ONG Gulf Centre for Human Rights (GCHR), qui défend le poète, ingénieur et défenseur des droits humains émirati Ahmed Mansoor, détenu depuis 2017 – il a été condamné l’année suivante à dix ans de réclusion pour « atteinte à la sûreté de l’Etat » – à Abou Dhabi dans « dans des conditions moyenâgeuses constitutives d’actes de torture ».
Jusqu’à son élection controversée à la présidence d’Interpol, le général Al-Raisi exerçait les fonctions d’inspecteur général du ministère de l’intérieur. Il a donc connaissance (et joué un rôle direct) des circonstances de l’arrestation, des interrogatoires, du procès bâclé et de la détention d’Ahmed Mansoor, maintenu pendant des mois à l’isolement dans une cellule de 4 m², privé de téléphone, de visites et de médicaments.
Contrairement aux « crimes contre l’humanité », l’incrimination pour « torture » n’est pas soumise à l’exigence de double incrimination – c’est-à-dire qu’elle doit être répréhensible dans le pays de l’auteur aussi – mais nécessite seulement la « présence » de la personne visée sur le sol national français.
« Techniquement, rien ne s’oppose à son audition »
La question qui se pose désormais est celle d’une éventuelle immunité du général Al-Raisi. Il ne peut théoriquement pas bénéficier de l’immunité diplomatique, car sa fonction ne consiste pas à représenter un Etat étranger en France. Il n’est pas non plus considéré comme un fonctionnaire des Nations unies, puisqu’il a été élu.
La plainte rédigée par Me William Bourdon pour le compte du GCHR écarte par avance toute invocation d’une « immunité fonctionnelle » de M. Al-Raisi, malgré la convention de 2008 qui régit les relations entre Interpol et la France. L’avocat souligne que l’infraction reprochée à M. Al-Raisi – les conditions de détention de M. Mansoor – est toujours en cours, qu’elle n’a pas été commise dans le cadre de ses fonctions à Interpol et que « les immunités doivent s’effacer devant les plus grands crimes internationaux », dont la torture fait partie.
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