Tribune. Refus de délivrer des licences aux pêcheurs français à Jersey, arraisonnement d’un chalutier britannique au Havre, convocation de l’ambassadrice de France à Londres, menaces de recours devant les tribunaux et de guerre commerciale : qui aurait pu imaginer, il y a encore un an, qu’on assisterait à une telle dégradation de la relation bilatérale franco-britannique, alors qu’on célébrait les 10 ans des accords de défense de Lancaster House signés en 2010 par David Cameron et Nicolas Sarkozy ?
Pour une part, ces tensions s’expliquent par le rôle joué par la France pendant les négociations sur le Brexit et par les choix stratégiques du gouvernement Johnson. Paris est apparu comme l’Etat membre le plus intransigeant pendant les interminables négociations sur l’accord de retrait puis sur les nouvelles relations entre l’Union européenne (UE) et le Royaume-Uni, même si le président ne faisait souvent qu’exprimer ouvertement ce que d’autres chefs de gouvernement pensaient, et même si la négociation était menée par l’équipe de Michel Barnier et non par les Etats membres.
Emmanuel Macron, comme le premier ministre, Jean Castex, encore ces derniers jours, a aussi clairement affiché, à cette époque, que la sortie de l’UE devait avoir des conséquences et qu’un pays désormais tiers ne pouvait espérer garder les mêmes bénéfices qu’un Etat membre.
La bonne entente qui prévalait avant le Brexit, déjà écornée, s’est désintégrée avec l’accord de coopération signé avec l’UE en décembre 2020, qui était bien en deçà de ce que Theresa May − dont on se souvient pourtant du slogan « Brexit means Brexit » (« Brexit signifie Brexit ») – avait envisagé. Même si les questions de la pêche et de la frontière irlandaise étaient censées être résolues, l’accord a introduit des contrôles douaniers sur les marchandises, mis fin à la libre circulation des travailleurs et rétabli des frontières pour les personnes, et ne prévoyait aucune forme de coopération institutionnalisée en matière de politique étrangère et de défense. Il était probablement inévitable qu’un tel recul par rapport aux libertés dont avaient bénéficié les citoyens et les entreprises des deux côtés de la Manche pendant plus de quarante ans provoque des tensions.
Depuis cette date, les contentieux bilatéraux se sont accumulés, qui s’ajoutent aux difficultés que le Royaume-Uni rencontre avec la Commission européenne sur l’application du protocole nord-irlandais, sans que les mécanismes diplomatiques habituels de gestion des conflits, à Bruxelles et ailleurs, puissent fonctionner.
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