Prix coûtant et réductions à gogo: la grande distribution rivalise de promotions sur le carburant face à la flambée des prix, sur un produit qui lui rapportait déjà peu de marge.
Depuis début octobre, les prix des carburants ont explosé dans le sillage d’une hausse des cours mondiaux: le prix du gazole a battu son record historique, à 1,5583 euro le litre, tandis que le sans plomb 95 tutoie ses sommets de 2012, à 1,6287 euro.
« Déjà en temps normal, j’ai un gros budget essence. En ce moment, je ne peux même plus faire le plein de mon camion », raconte à l’AFP Loïc Bonhomme, électricien.
Face à cette dépense qui pèse sur le pouvoir d’achat de nombreux Français, les distributeurs sont montés au créneau. A commencer par les centres E.Leclerc, qui ont annoncé lundi que toutes leurs stations-services hors autoroute vendraient le carburant à prix coûtant jusqu’à la fin du mois.
Casino, qui proposait déjà une offre similaire ponctuellement, a renchéri avec un système de bons d’achat censé faire passer le plein à un euro le litre, tandis que Carrefour lançait une remise de cinq euros pour chaque plein d’au moins 25 litres.
– Un produit d’appel –
Au-delà des belles intentions affichées, ces promotions sur le carburant restent dans la droite ligne des stratégies des distributeurs. Le carburant est pour eux un produit d’appel: moins il est cher, plus les automobilistes vont venir et peut-être en profiter pour faire leurs courses dans le magasin.
A l’image de Charlotte, qui s’est arrêtée dans un supermarché Casino à Nemours (Seine-et-Marne): « J’ai vu que c’était à prix coûtant au niveau du Casino donc je viens faire le plein », explique-t-elle.
Les distributeurs ont aussi un intérêt à encourager les consommateurs à prendre leur voiture, analyse Yves Marin, expert de la distribution au sein du cabinet Bartle, « car les hypermarchés sont à 15 minutes de trajet en moyenne ».
Leurs marges sur le carburant sont donc réduites: elles sont en moyenne de 0,3 et 1,5 centime par litre, contre 1 à 2 centimes pour les stations-services classiques, d’après le Conseil national des professions de l’automobile (CNPA).
Les hypermarchés peuvent se permettre des prix bas parce qu’ils dépendent aussi beaucoup moins de la vente de carburant que du reste de leurs activités.
En revanche, dans les stations-services hors grande distribution, où elle représente 40 à 70% de l’activité, « ce serait impossible de faire du prix coûtant », soutient Francis Pousse, président de la branche propriétaires-exploitants de stations-services du CNPA.
Dans les stations d’autoroute, les prix sont aussi plus élevés en raison d’importants coûts de fonctionnement: redevances à l’opérateur de l’autoroute, personnel présent 24h/24 tous les jours… Elles ont par ailleurs moins intérêt à baisser leurs prix car sur l’autoroute, la concurrence est moins importante: l’automobiliste préfère en général ne pas quitter sa trajectoire pour faire le plein.
En accédant à la demande de la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili, qui avait appelé la semaine dernière les distributeurs à « faire un geste » sur le prix des carburants, la grande distribution renverse aussi la situation et renvoie la faute au gouvernement.
« Pour limiter l’envolée des prix, je ne vois qu’un moyen: que les taxes soient diminuées », a notamment indiqué Michel-Edouard Leclerc, président du comité stratégique des centres E.Leclerc, en rappelant qu’elles représentent environ 60% du prix d’un plein.
Le gouvernement a indiqué mardi qu’il annoncerait « d’ici la fin de la semaine » un dispositif pour aider les Français à face à la hausse des prix. Il pourrait choisir d’agir sur les taxes ou proposer un chèque carburant pour les ménages les plus modestes, sur le modèle du chèque énergie.
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