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Quand la France était engagée aux côtés du Groupe Wagner en Libye

L’invasion russe de l’Ukraine a suscité, dans de nombreuses capitales européennes, un examen de conscience sur l’ampleur de l’aveuglement des dirigeants en place par rapport aux ambitions pourtant affichées de Vladimir Poutine. A Berlin, c’est le pari d’Angela Merkel sur l’intégration de la Russie par le commerce qui est mis en cause, tant il a accentué la vulnérabilité de l’Allemagne plutôt qu’encouragé un cycle vertueux avec Moscou.

En France, le débat demeure indulgent envers Emmanuel Macron et « l’architecture de sécurité et de confiance entre l’Union européenne et la Russie » qu’il a proposée en août 2019 à Poutine, en l’accueillant à sa résidence d’été de Brégançon. Peu après, le président français stigmatise en « Etat profond » les diplomates qui osent émettre des doutes sur sa volonté de rapprochement stratégique avec Moscou. Cette menace à peine voilée contribue à étouffer toute critique en interne du volontarisme élyséen. Ce n’est cependant pas en Europe, mais en Afrique du Nord, que s’est déroulé un des épisodes les plus troublants d’une telle séquence.

Tous unis pour Haftar

La première guerre civile de Libye, de février à octobre 2011, aboutit au renversement et à l’élimination de Mouammar Kadhafi, après quatre décennies de pouvoir absolu. Il faut attendre mai 2014 pour qu’éclate la deuxième guerre civile, à l’initiative d’un ancien général de Kadhafi, Khalifa Haftar, bientôt proclamé « maréchal ». Celui-ci se rêve en émule libyen de l’ex-maréchal Sissi, qui vient d’être « élu » à 97 % des voix à la tête de l’Egypte, après en avoir renversé le président islamiste. Dénonçant l’ensemble de ses adversaires comme des « terroristes », Haftar implante à Tobrouk, dans l’est du pays, des autorités rivales du gouvernement installé dans la capitale de Tripoli. Il refuse, en mars 2016, de se rallier au gouvernement d’union nationale de Faïez Sarraj, pourtant reconnu par l’ONU dès sa prise de fonction à Tripoli.

Haftar est ouvertement soutenu par l’Egypte et les Emirats arabes unis, qui violent l’embargo international pour continuer de l’armer, et plus discrètement par la Russie et par la France. Pour le Kremlin, il s’agit d’une forme de revanche sur la campagne de l’OTAN en 2011 en Libye. Pour François Hollande, la coopération avec Haftar participe de la logique « antiterroriste » sur l’ensemble du Sahel. En 2016, trois militaires français meurent en « service commandé » dans la chute d’un hélicoptère des forces d’Haftar à Benghazi.

Emmanuel Macron, deux mois après son entrée à l’Elysée, réunit Sarraj et Haftar à La Celle-Saint-Cloud, en juillet 2017, au nom de la réconciliation entre Tripoli et Tobrouk. Peu importe que soient ainsi mis sur le même plan le gouvernement reconnu par l’ONU et les autorités de fait du chef rebelle, l’essentiel est pour le président français de sortir de l’impasse, un espoir vite déçu. Mais le biais de Paris en faveur d’Haftar persiste et il est même accentué par la très forte proximité entre Macron et Mohammed Ben Zayed, l’homme fort des Emirats arabes unis, dont les dirigeants français épousent volontiers les querelles, notamment son obsession anti-islamiste.

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