Faut-il quitter Kiev, la capitale ukrainienne ? Igor Kossov hésite. Le vendredi 25 février, le journaliste d’investigation pour The Kyiv Independent trouve une place dans une voiture direction Vinnytsia, une ville à 200 kilomètres au sud-ouest. Il saute dans le véhicule, avant de « regretter immédiatement » son choix. Après quelques heures de route, il reprend un train dans le sens inverse. Plus question de partir : « C’est dans cette ville que le destin de l’Ukraine se décidera », explique-t-il au téléphone, en se servant de Telegram. Et le trentenaire, formé au reportage de guerre grâce à la couverture de la guerre civile libyenne en 2011, puis de la bataille de Mossoul, en Irak, en 2017, pour plusieurs médias américains, a prévu de raconter le sort de son pays.
Employé dans le seul média ukrainien indépendant en langue anglaise, le journaliste aimerait s’embarquer avec l’armée ukrainienne. « Je veux couvrir les combats directement sur le terrain », affirme-t-il posément. En attendant toutes les accréditations nécessaires, Igor Kossov multiplie les articles et les interviews. Notamment avec les habitants restés dans la capitale, malgré les bombes et la peur. Des témoignages diffusés sur le site du Kyiv Independent, avant d’être généralement lus puis partagés plusieurs centaines de milliers de fois sur les réseaux sociaux. Le reporter de guerre confirme : « Nous sommes devenus très populaires, très rapidement. »
Conditions de travail infernales
Six jours après le début de la guerre, The Kyiv Independent compte 1,6 million d’abonnés à son compte Twitter. Contre 20 000 avant le début de l’invasion russe sur le territoire ukrainien. Il possède aussi une chaîne sur l’application cryptée Telegram suivie par 42 000 abonnés. Des chiffres époustouflants pour un média créé tout juste trois mois plus tôt. Nous sommes fin novembre 2021 : Kyiv Post, publication indépendante, en anglais, créée en 1995 par un expatrié américain, est suspendu par son propriétaire, l’oligarque ukrainien Adnan Kivan.
« Je préfère mourir ici plutôt que partir pour ne jamais rentrer à Kiev. » Daryna Shevchenko, la PDG, à Kiev
Les cinquante employés du journal perdent leur emploi. Parmi eux, une trentaine de journalistes décident de lancer une campagne sous le hashtag #SaveKyivPost. Une nouvelle PDG (Daryna Shevchenko), une nouvelle rédactrice en chef (Olga Rudenko) et la même équipe de reporters lancent The Kyiv Independent dans la foulée. Pour continuer d’être les « traducteurs de l’Ukraine pour le reste du monde », confiait alors Brian Bonner, l’ancien rédacteur en chef, à M Le magazine du Monde. Aujourd’hui, cette « petite start-up », comme l’appelle sa rédactrice en chef adjointe, Toma Istomina, 26 ans, est devenue la source privilégiée permettant de suivre cette guerre tragique.
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