Publié le : 21/02/2022 – 17:32
La junte au pouvoir en Birmanie a contesté, lundi, la compétence de la Cour internationale de justice pour se prononcer sur l’accusation de génocide contre les Rohingya, communauté à majorité musulmane du pays. Environ 850 000 d’entre eux vivent dans des camps de fortune au Bangladesh.
La junte au pouvoir en Birmanie a contesté, lundi 21 février, devant les juges la compétence de la Cour internationale de justice (CIJ) pour se prononcer sur l’accusation de génocide contre les Rohingya, communauté à majorité musulmane du pays.
La délégation birmane, qui remplace l’ex-dirigeante civile Aung San Suu Kyi devant la plus haute instance judiciaire des Nations unies, estime que la requête, déposée par la Gambie au nom de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), n’est pas recevable.
« La Birmanie ne cherche pas à entraver le fonctionnement judiciaire de la Cour, au contraire », elle cherche à assurer le respect du bon cours de la justice, a déclaré, devant les juges Ko Ko Hlaing, le ministre de la Coopération internationale, qui a fait le déplacement.
Créée après la Seconde Guerre mondiale et basée à La Haye, aux Pays-Bas, la CIJ tranche les différends entre des États.
« La Birmanie soutient que la Cour n’est pas compétente et que la requête est irrecevable car le véritable requérant dans cette procédure est l’Organisation de la coopération islamique » (OCI), a déclaré Christopher Staker, avocat de la délégation birmane.
« Seuls les États ont la qualité de se présenter devant la Cour », or « l’OCI est une organisation internationale, pas un État », a-t-il ajouté.
« État mandataire »
« Il ne peut pas être possible pour une organisation internationale de porter une affaire devant la Cour en utilisant un État comme requérant mandataire », a poursuivi Christopher Staker.
Environ 850 000 Rohingya vivent dans des camps de fortune au Bangladesh, après avoir fui en 2017 une répression militaire sanglante dans leur pays à majorité bouddhiste. Quelque 600 000 autres restent dans l’État Rakhine, en Birmanie.
La Gambie, pays musulman qui avait déposé sa requête au nom de l’OCI, accuse le pouvoir birman de violer la Convention des Nations unies sur le génocide de 1948.
La Gambie présentera ses contre-arguments, mercredi, devant la CIJ. Les jugements de la Cour sont contraignants, mais elle ne dispose d’aucun moyen réel pour les faire appliquer.
Aung San Suu Kyi avait elle-même présenté les arguments de la Birmanie devant la CIJ, fin 2019, lorsque l’affaire avait été entendue pour la première fois, mais elle a depuis été évincée de la tête du gouvernement birman par le coup d’État militaire du 1er février 2021.
La lauréate du prix Nobel de la paix, qui avait été critiquée par des ONG de défense des droits humains pour son implication dans la persécution des Rohingya, est désormais assignée à résidence dans son pays par les mêmes généraux qu’elle a défendus à La Haye.
Répression sanglante
Avant l’audience de lundi, le « gouvernement d’unité nationale » birman, fondé par des parlementaires déchus entrés en clandestinité, a estimé que c’était lui, et non la junte, qui était « le représentant approprié de la Birmanie à la CIJ dans cette affaire ».
Il rejette en outre les « objections préliminaires » de la junte, estimant que la Cour devrait passer à l’étude de l’affaire sur le fond.
Ce « gouvernement d’unité nationale » n’est cependant reconnu par aucun gouvernement étranger et est considéré par la junte comme « terroriste ».
L’affaire de génocide présumé sur laquelle la CIJ doit statuer a été compliquée par le coup d’État qui a évincé Aung San Suu Kyi, déclenché des manifestations de masse et entraîné une répression sanglante, avec plus de 1 500 civils tués d’après un observatoire local.
Aung San Suu Kyi doit elle-même être jugée en Birmanie pour une série de chefs d’accusation qui pourraient lui valoir plus de 150 ans de prison.
Avec AFP
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