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« Les candidats à la présidentielle doivent prendre conscience que le tournant monétaire aura un coût élevé sur les finances publiques »

Tribune. Pour sauver l’euro, la Banque centrale européenne (BCE) a pu utiliser pendant dix ans, avec une extrême habileté, un élément-clé de son règlement : l’objectif d’inflation devait être « inférieur à mais proche de 2 % ». Alors que l’inflation était absente, une politique de monétisation de la dette publique a ainsi pu être mise en place, en dépit des traités, au prétexte que des taux bas contribueraient à la remontée des prix.

Mario Draghi a été un maître dans ce domaine et Christine Lagarde a très vite mis ses pas dans ceux de son prédécesseur. Tout au long de ces dix années, la BCE a multiplié les prêts à long terme aux banques, parfois à taux négatifs, et elle a procédé à partir de 2015 à des achats massifs de dettes publiques.

Des taux bas, quasiment administrés, ont permis de mettre un terme à la spéculation d’investisseurs qui prenaient prétexte des écarts de niveaux de dettes publiques pour faire diverger les taux d’intérêt. Cette morphine monétaire n’a pas été propre à la zone euro mais elle y a été particulièrement importante : le bilan de la BCE représente aujourd’hui les deux tiers du PIB de la zone monétaire alors que le bilan de la Réserve fédérale (Fed) ne représente qu’un tiers du PIB américain.

La présence de l’inflation

L’outil précieux de la BCE – faire référence à l’objectif d’inflation pour acheter de la dette publique – pourrait disparaître. Depuis plusieurs mois, l’inflation fait en effet son retour dans le monde. Christine Lagarde faisait le pari que ce phénomène serait temporaire mais, face à un chiffre de hausse des prix de 5 %, elle a dû admettre au cours du dernier conseil des gouverneurs que cela devenait moins évident…

L’inflation frappe à la porte, même en zone euro. Les politiques accommodantes des banques centrales ont créé de la monnaie bien au-delà des besoins de l’économie, ce qui n’est pas sans lien avec la flambée mondiale des prix de l’immobilier, des actifs financiers, des matières premières et désormais de certains biens avec le risque d’un engrenage prix-salaires.

La crise pandémique, en perturbant l’offre mondiale dans de multiples domaines, a ajouté des déséquilibres industriels à ces déséquilibres financiers. A plus long terme, la transition énergétique et l’aspiration à reconstituer des bases industrielles nationales pourraient, elles aussi, être les facteurs d’une hausse des prix durable (taxe carbone, coût de la main-d’œuvre).

La circulation des capitaux, un problème

Deux autres éléments viennent assombrir le ciel de la zone euro : l’écart des niveaux de dettes publiques au sein de la zone s’est terriblement creusé depuis dix ans et la circulation des capitaux ne s’est pas améliorée. Les niveaux de dettes publiques étaient les mêmes en France et en Allemagne au moment de la création de la zone monétaire, toujours les mêmes à la veille de la crise financière de 2008 (64 % du PIB) et encore très proches au lendemain de cette crise (88 % en France, 80 % en Allemagne).

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