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Iran : « Le retour de l’anthropologue Fariba Adelkhah derrière les murs de la prison ne se réduit pas à la seule question nucléaire »

Tribune. Fariba Adelkhah, directrice de recherche à Sciences Po, a été arrêtée, le 5 juin 2019, sous des prétextes loufoques d’atteinte à la sécurité nationale, condamnée à cinq ans de prison et assignée à résidence sous contrôle d’un bracelet électronique en octobre 2020. A la stupeur générale, elle a été réincarcérée, ce 12 janvier 2022. Les autorités l’accusent de ne pas avoir respecté les modalités de son contrôle judiciaire.

Les diplomates iraniens relayent cette thèse en susurrant à qui veut l’entendre qu’elle se serait rendue à l’ambassade de France – mais pourquoi diable en serait-elle ressortie ? – ou, plus drôle encore, que cette dernière aurait refusé de l’héberger dans ses locaux, comme le proposait la partie iranienne, parce qu’elle serait « incontrôlable ». A force de méconnaître les sociétés occidentales, les tenants de la République islamique versent dans le fantastique.

Ces pantomimes dissimulent mal la seule évidence qui vaille. Le problème n’est pas de savoir si Fariba Adelkhah a respecté, ou non, le contrôle judiciaire qui lui avait été imposé. Il réside dans l’iniquité absolue de sa privation de liberté, quelles qu’en soient les modalités, car son seul tort est d’avoir exercé son métier d’anthropologue, une discipline scientifique que ne proscrit pas la Constitution iranienne.

Un enjeu diplomatique

En l’occurrence, Fariba Adelkhah n’a pas violé les interdictions arbitraires que stipulait son contrôle judiciaire. Ce n’est d’ailleurs pas l’autorité administrative chargée de la vérification de celui-ci qui a pris l’initiative de sa réincarcération, mais le procureur, inféodé aux Gardiens de la révolution. Cette mesure est purement politique, tout comme le furent son arrestation en 2019 et son assignation à résidence en 2020, ou encore la condamnation à huit ans de prison du touriste Benjamin Brière.

Autrement dit, le retour de l’anthropologue derrière les murs de la prison d’Evin est lié, d’une manière ou d’une autre – et bien malin qui peut savoir ce qu’il en est –, aux relations tumultueuses de l’Iran avec les chancelleries occidentales, qui ne se réduisent pas à la seule question nucléaire, mais impliquent également les multiples conflits de la région et les tentatives d’attentat de Téhéran contre son opposition exilée en Europe.

Fariba Adelkhah est comme un bouchon qui flotte et coule au gré des courants et des remous des négociations diplomatiques, opaques et multidimensionnelles, entre différentes capitales. Comme à leur habitude, les Etats-Unis traitent avec l’Iran sur une base bilatérale, dans le dos des pourparlers nucléaires multilatéraux de Vienne et de Genève, et ne font pas grand cas des intérêts de leurs « alliés ».

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