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« En intervenant au Kazakhstan, la Russie veut faire reconnaître sa suprématie en Asie centrale et au-delà »

Tribune. Au Kazakhstan, ce géant d’Asie centrale grand comme cinq fois la France et riche en hydrocarbures, la décision gouvernementale d’augmenter le prix du gaz de pétrole liquéfié (GPL), au tout début de l’année, a mis le feu aux poudres et provoqué une insurrection populaire. L’escalade de la violence et de la répression a précipité le pays dans le chaos, conduisant à une intervention militaire de la Russie, le 7 janvier, pour éviter la guerre civile, et a abouti à un remaniement à la tête de l’Etat, le 13 janvier. Cette nouvelle ingérence russe dans son « étranger proche », que Moscou considère comme sa zone d’influence par tradition, sera lourde de conséquences pour le Kazakhstan, pour l’Asie centrale et pour les ambitions hégémoniques de la Russie sur son ex-empire et au-delà.

Ce n’est pas un hasard si la crise a démarré dans la région occidentale du pays. Alors que la ville d’Aktaou est construite sur un inestimable trésor d’hydrocarbures, dont la manne est accaparée par l’élite au pouvoir outrageusement opulente, la population, elle, s’enfonce chaque jour davantage dans la pauvreté et la misère. En pareil cas, nulle surprise que la frustration économique et l’injustice sociale produisent de vives étincelles. Des revendications politiques ont rapidement entraîné tout le pays dans une crise violente de protestation et de défiance à l’égard du pouvoir. Celui-ci, pris de panique à l’idée de perdre ses privilèges, a durement réprimé et envenimé des affrontements déjà tendus dans la périphérie d’Almaty [ancienne capitale et plus grande ville du pays], entre forces de l’ordre et bandes criminelles mafieuses, probablement recrutées par des élites au pouvoir.

Pris au dépourvu, le président, Kassym-Jomart Tokaïev, a réagi avec vigueur en annonçant le gel des prix, mais surtout le limogeage de nombreux responsables politiques. Il a mis un terme aux fonctions de son mentor, l’ancien président Noursoultan Nazarbaïev, dont le retrait officiel des affaires politiques [depuis 2019] cachait mal la réalité persistante de son emprise sur le pouvoir. Celui qui s’était fait nommer de façon exceptionnelle « Elbasi » (« père de la nation ») et présidait le Conseil de sécurité, où se concentre l’essentiel du pouvoir, restait en effet l’homme fort du pouvoir kazakh. Mais ces mesures furent insuffisantes pour rétablir l’ordre, et le président Tokaïev dut faire appel à la Russie, qui déploya des troupes conformément au cadre de coopération de l’Organisation du traité de sécurité collective (OTSC), pour éviter que le pays, livré à la guerre des clans, ne s’enfonce dans l’abîme.

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