Le Conseil d’Etat a suspendu lundi l’arrêté du gouvernement interdisant la vente de la fleur et de la feuille de chanvre chargée en CBD, la molécule non-psychotrope du cannabis, un soulagement pour des acteurs de la filière.
La plus haute juridiction administrative avait été saisie par divers acteurs de la filière souhaitant obtenir la suspension en urgence d’un arrêté pris par le gouvernement le 30 décembre et qui proscrit la vente et la consommation de fleurs de chanvre contenant du cannabidiol (CBD).
Dans son ordonnance, le Conseil d’Etat a estimé qu’il « ne résulte pas de l’instruction(…) que les fleurs et feuilles de chanvre dont la teneur en THC n’est pas supérieure à 0,30% revêtiraient un degré de nocivité pour la santé justifiant une mesure d’interdiction générale et absolue de leur vente aux consommateurs et de leur consommation ».
Le Conseil d’Etat a précisé dans un communiqué que la suspension s’applique « à titre provisoire » en attendant que l’instance « se prononce définitivement au fond sur la légalité de l’arrêté contesté ».
L’Etat devra verser la somme totale de 13.000 euros aux treize sociétés requérantes.
« Pour nous c’était une épine dans le pied, on était aux abois et ça remettait en cause toute la filière. L’horizon se dégage mais tout reste à faire », s’est réjoui Aurélien Delecroix, président du syndicat du chanvre, l’une des parties requérante.
« Le ministère a essayé de défendre un argument de santé publique qui de toute façon ne tenait pas la route », a réagi Me Uzan-Sarano, conseil du syndicat du chanvre, sollicité par l’AFP.
Xavier Pizarro, avocat de l’Union des professionnels du CBD, a pour sa part salué une décision qui témoigne d’une « maîtrise du droit européen, là où le gouvernement veut faire un coup politique ».
Contactée par l’AFP, la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les toxicomanies (Mildeca) a indiqué par l’intermédiaire de sa déléguée, Valérie Saintoyant, « prendre acte de la décision » sans souhaiter « commenter sur le fond ».
En novembre 2020, la Cour de justice de l’Union européenne avait ainsi jugé illégale l’interdiction en France du CBD, autorisée dans plusieurs autres pays européens, au nom du principe de libre circulation des marchandises.
La justice européenne a estimé qu’il n’avait « aucun effet nocif sur la santé » et ne pouvait être considéré comme un stupéfiant, à la différence de sa molécule jumelle, le THC, que l’on peut trouver sur le marché noir et qui est dotée d’effets psychotropes.
La Cour de cassation, plus haute juridiction de l’ordre judiciaire français, lui a emboîté le pas considérant en juin que tout CBD légalement produit dans l’UE pouvait être vendu en France.
La France comptait quelque 400 boutiques de CBD début 2021 selon le Syndicat professionnel du chanvre (SPC), il en existe désormais quasiment quatre fois plus. Le chiffre d’affaires du secteur est estimé par les syndicats à un milliard d’euros, les deux-tiers issus de la commercialisation des fleurs et feuilles brutes.
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