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RD Congo : les mouches soldats noires, solution éco et écolo contre l’insécurité alimentaire

Publié le : 19/01/2022 – 13:31

Depuis plusieurs mois, Murhula Zigabe élève à Bukavu, dans l’est de la République démocratique du Congo, des mouches soldats noires, dont les larves ont une particularité : elles se nourrissent de déchets alimentaires et sont elles-mêmes utilisées par des éleveurs locaux pour nourrir poissons, poules et cochons. Moins chères que des protéines animales classiques, elles permettent de lutter  contre l’insécurité alimentaire.

Murhula Zigabe a créé en 2018 l’entreprise Briquette du Kivu, qui produit du charbon écologique à partir de déchets organiques ramassés dans les rues ou chez les ménages (restes de maïs, épluchures de bananes, etc.). Il s’agit d’une alternative au charbon de bois, utilisé par l’immense majorité des Congolais pour cuisiner, et qui contribue à la déforestation.

>> LIRE SUR LES OBSERVATEURS : La « Briquette du Kivu » : un étudiant congolais développe son charbon écologique 

« La RD Congo dépense environ 2 milliards de dollars annuels pour importer de la nourriture, mais une grande partie n’est même pas consommée » 

Mais l’entrepreneur s’est rendu compte qu’il ne pouvait pas utiliser tous les déchets ramassés pour fabriquer du charbon écologique, tels que les fruits et légumes déjà pourris, « en raison de leur faible densité ». Il a alors eu l’idée d’utiliser ces déchets pour nourrir des larves de mouches soldats noires, qu’il a commencé à élever en avril 2021. 

Les mouches soldats noires ne piquent pas et ne mangent pas : elles ne font que boire de l’eau et pondre des œufs, que nous récoltons. Quand ils éclosent, nous obtenons des larves, que nous nourrissons des déchets ramassés : peaux d’orange, de mangue, de papaye… Deux semaines plus tard, les larves sont grosses et très riches en protéines. Elles peuvent alors servir à nourrir les poissons, les poules et les cochons.


Élevage de mouches soldats noires, au sein de l’entreprise “Briquette du Kivu”. © Murhula Zigabe.


Larves de mouches soldats noires, nourries avec des déchets alimentaires. © Murhula Zigabe.

« Avec nos larves, les éleveurs locaux ont accès à une alimentation moins coûteuse »

Alors que la population et la demande en protéines ne cessent d’augmenter dans le monde, les protéines d’insectes peuvent « contribuer à la sécurité alimentaire humaine et animale », selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture. Les insectes sont partout, ils se reproduisent rapidement, ils sont nutritifs et leur production a un faible impact environnemental, par rapport aux protéines végétales comme le soja, indique ainsi l’agence onusienne. Notre Observateur détaille : 

Actuellement, la RD Congo compte plus de 80 millions d’habitants et sa population va doubler d’ici trente ans, donc elle doit être en mesure de nourrir tout le monde. Mais malheureusement, elle ne produit pas assez de nourriture, alors que c’est un pays à fort potentiel agricole. Chaque année, la RD Congo dépense donc environ 2 milliards de dollars pour importer de la nourriture, pour les humains et les bêtes. Mais une grande partie n’est même pas consommée, et finit à la poubelle… 


Les larves, riches en protéines, servent de nourriture aux poissons, aux poules et aux cochons. © Murhula Zigabe.

Actuellement, beaucoup d’éleveurs nourrissent leurs bêtes avec des protéines de soja et de poisson. Or, lorsqu’ils se rendent au Rwanda, au Burundi ou en Ouganda pour les acheter, le kilo de protéines leur coûte un dollar, alors que nous vendons nos protéines d’insectes à 0,75 dollar. Du coup, avec nos larves, nous encourageons les éleveurs locaux à s’investir davantage, puisqu’ils ont accès à une alimentation moins coûteuse, ce qui permet de lutter contre l’insécurité alimentaire. 


Les protéines d’insectes de “Briquette du Kivu” sont vendus à des éleveurs locaux, à 0,75 dollar le kilo. © Murhula Zigabe.

De plus, ils apprécient notre protéine, car ils disent qu’elle est plus riche que la farine de soja et de poisson. Cela dit, notre production est encore faible, donc nous ne pouvons pas encore répondre à toute la demande.

L’autre problème des protéines de poisson et de soja, c’est que, pour les produire, il faut pêcher des tonnes de poissons et détruire des forêts. En plus, c’est l’homme qui devrait consommer le soja et le poisson, et non les bêtes… Donc les protéines d’insectes constituent une alternative pour l’alimentation animale, car leur élevage n’a aucun impact sur l’environnement. Déjà, nous nourrissons les larves des mouches soldats noires avec des déchets que nous ramassons, ce qui permet de nettoyer la ville de ces déchets qui polluaient l’environnement. De plus, nous n’avons même pas besoin d’électricité pour convertir les déchets en protéines.


L’équipe de “Briquette du Kivu” ramasse des déchets alimentaires dans les poubelles des ménages, des restaurants, des hôtels, ou encore des écoles, pour ensuite les donner à manger aux larves des mouches soldats noires. © Murhula Zigabe.


Les larves des mouches soldats noires sont nourries avec des déchets alimentaires ramassés dans les rues de Bukavu, ce qui permet de nettoyer la ville de ces déchets qui polluaient l’environnement. © Murhula Zigabe.

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