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En Espagne, deux ans et demi de prison pour une célèbre voyante de la télévision pirate

LETTRE DE MADRID

La devanture de la boutique d’ésotérisme de Pepita Vilallonga, offrant ses services de voyante, avant qu’elle ne la change. GOOGLE MAPS

Pour une voyante, Pepita Vilallonga, n’a, semble-t-il, rien vu venir. Le 27 décembre 2021, cette populaire cartomancienne espagnole a été condamnée en première instance à Barcelone à deux ans et demi de prison pour escroquerie, assortis d’une interdiction de travailler dans le domaine de l’ésotérisme. Deux associés, dont son propre fils, ont écopé de la même peine. Le tribunal a insisté sur « le degré particulier d’inhumanité et de cruauté » dont ils ont fait preuve. Les trois condamnés ayant fait appel, ils ne seront cependant incarcérés que si la peine est confirmée en deuxième instance.

Les faits remontent à l’année 2016. A l’époque, Rosalia P., une femme de 57 ans, ancienne professeure atteinte d’une psychose maniaco-dépressive, mise à la retraite anticipée depuis un an, sollicite une consultation de tarot divinatoire auprès de Mme Vilallonga. Le verdict de la voyante est sans appel, raconte-t-elle au juge : elle va périr d’une « mort sûre et imminente », elle et ses chiens, avant la fin de la semaine. Quelqu’un lui a lancé « le mauvais œil » et elle « porte la mort sur son dos ».

La victime, présentant une « grande fragilité » et « vulnérabilité émotionnelle », plonge dans un « état de sidération et d’insécurité », résume le tribunal dans son verdict. Terrifiée, elle perd la capacité de mettre en doute les propos de la cartomancienne. Pour y remédier, celle-ci lui explique qu’il y a bien quelques sortilèges et incantations, mais ils ont un coût. La cliente va immédiatement retirer à la banque 4 400 euros en espèces. Tout juste de quoi retarder sa mort.

Pour la sauver vraiment, c’est une autre paire de manches : un prêtre du Vatican, le père Giorgio, doit venir en personne, lui dit-on. Et le faux curé bafouillant un mélange d’espagnol et d’italien se présente effectivement après le versement de 10 000 euros. Il demande un vêtement à Rosalia, qu’il entend enterrer à Jérusalem. Le rituel se complique quelques jours plus tard, quand on lui explique que le père Giorgio a été victime d’un accident à sa descente d’avion, sans doute une conséquence de son « mauvais œil ». Elle doit verser 17 000 euros de plus.

Une précédente plainte classée

Dépouillée de ses économies, Rosalia P. ne peut plus continuer son « traitement ». La voyante et ses associées ne répondent plus à ses appels. Au total, elle a dépensé plus de 31 000 euros dans l’entreprise et attend que la mort vienne la chercher. Et attend… Il lui faudra encore quelques semaines avant de se décider à porter plainte.

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