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Au procès Wendel, Ernest-Antoine Seillière se défend d’avoir voulu tromper le fisc

« Indigné » d’être face à un tribunal, l’ex-président du Medef Ernest-Antoine Seillière s’est défendu jeudi d’avoir voulu tromper le fisc à hauteur de 79 millions d’euros en 2007, affirmant qu’il était à l’époque persuadé de la légalité du schéma financier utilisé.

Passant du bon mot à l’emportement, l’ancien président du conseil de surveillance de Wendel, 84 ans, a été interrogé pendant près de quatre heures sur un programme d’intéressement baptisé Solfur, qui lui vaut d’être jugé pour fraude fiscale aux côtés de treize autres prévenus.

S’il a bien lancé Solfur en 2004, Ernest-Antoine Seillière affirme ne pas avoir participé à l’élaboration, fin 2006 et début 2007, du savant montage financier qui a alors permis à 14 cadres de récupérer 4,6% du capital, soit 315 millions d’euros de plus-values, sans être imposés.

Les dizaines de mails sur le sujet entre des cadres de la société d’investissement, leurs avocats et la banque JP Morgan, il dit les avoir découverts pendant l’instruction. « J’ai lu l’ensemble des documents et je dois dire que je n’en connaissais strictement rien », assure le prévenu, costume gris et voix grave.

En janvier 2007, une partie des responsables est « briefée » lors d’un séminaire dans la cossue station de ski de Meribel, dans les Alpes. Mais lui assure avoir été mis au courant après, « par oral et de manière informelle », puis par une note du 12 mars 2007, rédigée par des avocats du réputé cabinet Debevoise&Plimpton.

Transmise à l’ensemble des cadres, cette longue note détaille l’horlogerie financière du montage et soupèse longuement le « risque fiscal » associé.

D’un côté, le montage, qui a une « conséquence fiscale très intéressante », « me convient parfaitement », déclare Ernest-Antoine Seillière, lui-même membre de la famille Wendel qui contrôle le capital de l’entreprise.

Mais la note développe aussi un « risque d’+abus de droit+ », c’est-à-dire la possibilité que le fisc voit dans le schéma un contournement de la loi.

C’est finalement le « dernier paragraphe » qui a « totalement emporté ma conviction », poursuit le prévenu avant de le lire, en appuyant chaque mot: « Le risque que le schéma décrit dans ce mémorandum puisse être considéré par l’administration fiscale comme une abus de droit est nul ! »

La présidente du tribunal le reprend: le document précise que ce risque est « nul », mais sous certaines conditions…

« Ecoutez, si je vais en prison pour ça, alors d’accord ! », s’énerve le baron Seillière, qui le répète: pour lui, la note était « parfaitement rassurante ».

– « Madame la ministre » –

Au fil des questions, il assure qu’il n’avait pas de « doute ». « Si cette note avait dit : +les gars, ne faites pas cette affaire parce que l’abus de droit est quand même trop risqué, on aurait arrêté tout de suite ! » lance-t-il.

Pour le parquet national financier (PNF), les prévenus ont volontairement crée des sociétés uniquement pour bénéficier artificiellement d’un mécanisme légal, le « sursis à imposition », afin de différer, voire de ne pas payer d’impôt.

S’ils avaient reçu les titres directement et non via ces structures, ils auraient été imposés à environ 30%.

Selon la plainte du fisc, il est devenu propriétaire d’1% du capital de Wendel, d’une valeur de 79 millions d’euros, pour un investissement initial de 211.000 euros.

Le fisc a quant à lui jugé le montage frauduleux et notifié fin 2010 un lourd redressement fiscal à chacun des cadres. 56 millions pour M. Seillière qu’il a contesté devant la justice administrative, avant de conclure une transaction avec le fisc dont le montant n’a pas été dévoilé.

Dans le même élan, le prévenu accuse une membre de sa famille qui avait porté plainte au début de l’affaire, ainsi que Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances de l’Assemblée puis ministre de l’Economie, d’avoir eu une « obsession » pour Wendel.

« Je voudrais dire avec quelle indignation nous ressentons notre présence devant vous », déclare finalement l’ancien patron des patrons, qui enchaîne sur un lapsus: « A l’évidence, madame la ministre… », avant de s’interrompre dans l’hilarité de la salle.

Il reprend: « Nous avons été pendant plus de 10 ans lourdement perturbés dans nos existences personnelles, sans avoir jamais eu le sentiment d’être coupables de rien et d’avoir rendu à notre pays, là où nous étions, comme nous le pouvions, service ».

Le procès se poursuit lundi après l’interrogatoire des autres prévenus.

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