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Face aux manifestations au Kazakhstan, le régime débranche son réseau Internet

Alors que le Kazakhstan est en proie à de violentes manifestations consécutives à l’augmentation du prix des carburants qui ont fait plusieurs morts et des centaines de blessés, l’Etat a riposté en débranchant, dès mardi 5 janvier, des pans entiers de son réseau Internet.

Selon Netblocks, un organisme qui suit et étudie les coupures de réseau, et Cloudflare, une entreprise spécialisée dans l’infrastructure Internet, c’est d’abord le réseau Internet mobile, très important dans le pays, qui a été fortement perturbé mercredi en milieu d’après-midi. Dès mardi, l’un des opérateurs mobiles du pays reconnaissait avoir reçu l’ordre d’interrompre ses services. Par ailleurs, selon des journalistes et activistes présents sur place, l’utilisation des messageries mobiles Telegram, Signal et WhatsApp était difficile depuis plusieurs jours.

Aux alentours de 18 h 30, heure locale, mercredi, un blocage pur et simple a été appliqué à tout le réseau Internet dans le pays, fixe et mobile. Tous les fournisseurs d’accès à Internet du pays ont été concernés. Cette coupure a touché également les sites officiels de l’Etat kazakh, dont certains demeurent encore aujourd’hui inaccessibles depuis l’étranger. A Noursoultan, la capitale politique du pays, aucune connexion à Internet n’est possible depuis lors. Seuls les appels téléphoniques fonctionnent encore, selon la chaîne de télévision Mir24.

Il y a toutefois eu une brève embellie mercredi en toute fin de journée, selon Netblocks et l’agence de presse russe Tass, notamment à Almaty, la principale ville du pays. Ce relâchement est intervenu alors que le président kazakh, Kassym-Jomart Tokaïev, prononçait un discours télévisé dans lequel il a demandé de l’aide aux pays voisins, et en premier lieu à la Russie, pour faire face à ces manifestations.

⚠️ Confirmed: #Kazakhstan is again in the midst of a nation-scale internet blackout as of early morning Thursday.… https://t.co/Oa8eV7kgoY

— netblocks (@NetBlocks)

Après quelques heures durant lesquelles une partie du réseau était de nouveau fonctionnelle, le blocage total a cependant été remis en place. Dans la nuit de mercredi à jeudi, le réseau téléphonique et Internet était à nouveau totalement inutilisable à Almaty, a rapporté l’antenne kazakhe de Radio Free Europe, et Internet était totalement coupé à l’échelle du pays, selon Tass.

Jeudi en fin d’après-midi, plusieurs instruments de mesure du trafic Internet montraient que le réseau semblait avoir été rebranché, au moins partiellement.

Une coupure « d’ampleur inédite »

« Ce n’est pas la première fois que nous assistons à des perturbations d’Internet au Kazakhstan en marge d’élections ou de manifestations, mais celles-ci sont d’une ampleur inédite. (…) Ce qui est marquant est le déploiement rapide des restrictions d’Internet à l’échelle nationale. Cela rend difficile d’avoir une image claire de ce qu’il se passe sur place au Kazakhstan », a déclaré Alp Toker, le directeur de Netblocks, interrogé par le site ZDNet.

Tanzanie, Inde, Biélorussie, Iran, Birmanie, Russie… Le Kazakhstan figure en effet sur la longue liste des pays qui, ces dernières années, ont entrepris de perturber voire de couper purement et simplement l’accès à Internet pour faire face à des mouvements de contestation internes. Le but étant à la fois de désorganiser ces derniers, les privant de moyens de communiquer et de se coordonner, mais aussi de limiter la circulation des informations vers l’extérieur du pays. « Les autorités doivent immédiatement restaurer l’accès à Internet pour tous », a réagi AccessNow, une ONG en pointe dans la lutte contre la censure d’Internet.

S’il est sans doute trop tôt pour mesurer l’impact de cette coupure massive sur la contestation inédite qui anime le Kazakhstan, elle a en tout cas eu un effet immédiat sur le cours du bitcoin, en raison de la place importante qu’occupe depuis peu le pays dans l’écosystème de la cryptomonnaie. De nombreux « mineurs » – le terme utilisé pour ceux qui utilisent des ordinateurs connectés très puissants et gourmands en énergie pour effectuer les lourds calculs informatiques nécessaires à la création du bitcoin – se sont récemment installés au Kazakhstan, attirés par le climat froid propice à leurs installations productrices de chaleur, et poussés par le récent bannissement de leur activité par la Chine. Le pays est ainsi aujourd’hui le deuxième « producteur » mondial de cette cryptomonnaie. La coupure d’Internet dans le pays a perturbé cette activité, et la valeur d’un bitcoin a perdu un peu moins de 8 % en 24 heures.

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