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En Inde, les appels à la haine sont devenus monnaie courante

Le premier ministre indien Narendra Modi lors d’un rassemblement à Allahabad, en Inde, le 21 décembre 2021. SANJAY KANOJIA / AFP

Les propos glacent le sang. Ils ont été proférés par des religieux, extrémistes hindous, lors d’un événement organisé entre le 17 et le 19 décembre dans la ville sainte d’Haridwar, dans l’Etat d’Uttarakhand, à quelque 200 kilomètres au nord de New Delhi. Devant des foules tout entières acquises à leur cause, ils ont fait le serment de faire de l’Inde, pays laïque et multiconfessionnel, une nation hindoue – quitte à éliminer les dizaines de millions de musulmans indiens (15 % du milliard d’Indiens).

Quelques jours plus tard, un appel au génocide des musulmans a fait le tour des réseaux sociaux. « Si nous sommes cent d’entre nous prêts à tuer deux millions d’entre eux, alors nous serons victorieux et ferons de l’Inde une nation hindoue », lance une femme, identifiée sur l’une des vidéos comme Pooja Shakun Pandey, du Hindu Mahasabha, un groupe ultranationaliste. Dans ce clip, elle appelle également à prier pour Nathuram Godse, l’assassin du Mahatma Gandhi, père de la nation, qui prônait, lui, l’harmonie entre les religions.

Malgré la gravité des menaces, le premier ministre, Narendra Modi, issu des rangs des nationalistes hindous du Bharatiya Janata Party (Parti du peuple indien, BJP), est resté silencieux. « Ces idées sont très anciennes, mais elles sont désormais énoncées en toute impunité, sans qu’aucun membre du parti au pouvoir les condamne et avec le soutien tacite du gouvernement », souligne Gilles Verniers, professeur de science politique à l’université privée d’Ashoka, dans la banlieue de New Delhi.

Sentiment d’impunité

Ces discours de haine interviennent alors que plusieurs élections régionales-clés doivent avoir lieu début 2022. C’est le cas en Uttarakhand, où s’est déroulé cet événement, mais aussi en Uttar Pradesh, où Narendra Modi fait activement campagne pour le chef de gouvernement sortant, le moine fanatique Yogi Adityanath, lui aussi régulièrement épinglé pour ses remarques contre la minorité musulmane qui représente quelque 200 millions de personnes dans cet Etat.

« A chaque élection, le BJP pense qu’il ne peut gagner qu’en polarisant la société, et les discours du premier ministre ne sont qu’une version plus sophistiquée des grossiers appels à la haine prononcés par les religieux d’Haridwar », observe Dhirendra K. Jha, auteur de plusieurs ouvrages sur les groupes extrémistes hindous. Ce spécialiste en veut pour preuve le discours de Narendra Modi à Varanasi (Bénarès), en Uttar Pradesh, le 13 décembre, dans lequel il a conspué l’empereur musulman Aurangzeb, qui régna de 1658 à 1707. « Ici, si un Aurangzeb arrive, alors un Shivaji se lève », avait-il lancé, en référence à ce chef militaire hindou, fondateur et dirigeant de l’empire marathe (1630-1680).

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