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« Le jour, on observe, la nuit, on agit » : en Ethiopie, les miliciens finissent de « nettoyer » le terrain

Par Noé Hochet-Bodin

Publié aujourd’hui à 19h00

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ReportageLors de leur retrait, les forces tigréennes ont laissé derrière elles des combattants. Des « justiciers désintéressés » les pourchassent.

Huit miliciens en arme guettent d’une colline l’entrée de Shewa Robit, une ville de 30 000 habitants située en région Amhara, dans le nord de l’Ethiopie. Sandales aux pieds et fusils hors d’âge entre les mains, tous ont participé à la contre-offensive qui a repoussé plus au nord les rebelles des Forces de défense tigréennes (TDF), début décembre. Il s’agit désormais d’assurer la surveillance et le « nettoyage » du district.

« Le jour, on observe, la nuit, on agit », résume Seifu Yazew, ancien soldat de l’armée fédérale éthiopienne reconverti en chef de la milice à Shewa Robit, son shirit (foulard traditionnel) autour des épaules. « Lors de son retrait, la junte [nom donné aux hommes des TDF] a laissé derrière elle quelques combattants et nous devons les éliminer », explique-t-il pour justifier ces « opérations de nettoyage ».

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Très populaires au sein de la population, Seifu Yazew et sa centaine d’hommes se considèrent comme des justiciers désintéressés. La plupart sont fermiers. D’autres sont des administrateurs locaux ou des militaires à la retraite. Tous ont été mobilisés à la hâte par le gouvernement devant la menace que faisaient planer les rebelles tigréens à l’été. « On fait ça gratuitement pour la sécurité des habitants », assure Lakew Teshome, combattant de 40 ans.

Seifu Yazew, chef local de la milice amhara, dans son bureau à Shewa Robit, en Ethiopie, le 9 décembre 2021. EDUARDO SOTERAS POUR « LE MONDE » Des membres de la milice amhara descendent une colline près du village de Wanza, en Ethiopie, le 9 décembre 2021. EDUARDO SOTERAS POUR « LE MONDE »

Le conflit dans le nord de l’Ethiopie s’est dangereusement mué en guerre de milices, lorsque, au mois de juillet, les TDF ont repris le contrôle de la majorité de la province du Tigré et ont poursuivi leurs ennemis dans les régions voisines Afar et Amhara. Pris de court par la débandade de l’armée fédérale, le gouvernement n’a eu d’autres choix que d’enrôler des civils. Des engagés qui s’ajoutent aux miliciens déjà organisés, comme les combattants nationalistes amhara Fano, accusés depuis le début du conflit de nombreuses exactions contre les Tigréens et les Qemant.

Le 25 juillet, la région Amhara a appelé « tous les jeunes hommes, miliciens et civils, possédant une arme personnelle ou enregistrée, à rejoindre la lutte contre le Front populaire de libération du Tigré [TPLF] ». Les fonctionnaires de la province ont aussi été poussés à monter au front, sous peine de suspension de leur salaire.

Combattants irréguliers

En août, l’administrateur de la zone du Nord Wollo, Seid Mohammed, estimait à 2,7 millions le nombre d’individus ayant suivi une formation de milicien plus ou moins poussée dans la région Amhara, qui compte plus de 25 millions d’habitants. « Dans chaque quartier, les résidents prennent part à un entraînement de base, surtout les jeunes. Aussi bien ceux qui possèdent une arme que ceux qui n’en ont pas », explique-t-il.

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