France World

Argentine : de l’explosion sociale de 2001 à 2021, l’histoire d’une crise

Le groupe des Locataires organisés dénonce les conditions du marché locatif argentin sur la Plaza de Mayo, à Buenos Aires, le 25 janvier. ANITA POUCHARD SERRA

La pandémie de Covid-19 et ses restrictions ont eu raison du centre culturel qu’il a lancé en 2016, les maigres aides de l’Etat et ses économies n’ayant pas suffi à verser les loyers. Alors, Sebastian Masquelet, 40 ans, a décidé de retaper la maison de plain-pied de ses arrière-grands-parents, convaincu trois associés et lancé, au mois de juillet, une librairie doublée d’un café, en plein Buenos Aires. « J’avais la chance de pouvoir disposer de ce lieu qui n’implique pas un loyer. Mais finalement, si on fait ça, c’est parce qu’on est fous. On n’a aucun moyen de se projeter », souffle-t-il, dans l’esprit qui résume la lucidité mâtinée d’allant des Argentins, régulièrement mis à terre et qui, chaque fois, se relèvent.

En cinq mois déjà, l’inflation, mal insidieux de l’économie (51 % en novembre 2021, comparé à la même période de 2020), a détricoté sa charpente salariale. « Quand on s’est lancés, on versait de bons salaires à nos six employés. Aujourd’hui, ils sont mauvais », reconnaît l’entrepreneur, qui, comme toute sa génération, a fait ses premiers pas d’adulte dans le chaos, pendant la crise de 2001. « J’avais 20 ans et une sensation de fin du monde. Aujourd’hui, je me demande si les choses ont changé. C’est frustrant », confie-t-il, conscient de ses privilèges : il ne fait pas partie des 44 % de personnes vivant sous le seuil de pauvreté, selon les derniers calculs de l’Observatoire de la dette sociale de l’Université catholique.

La croissance actuelle, dont se targue le gouvernement d’Alberto Fernandez (centre gauche) car plus forte que prévue, avec un bond du produit intérieur brut de 10 % en 2021, permet statistiquement d’absorber la chute du même ordre de l’année 2020, sous l’impact de la pandémie. Cependant, elle ne ramène pas le pays au niveau de pauvreté d’avant la récession de 2018 (28 % de la population en 2017).

L’anniversaire de la crise de 2001, qui avait culminé les 19 et 20 décembre de cette année-là, avec des manifestations monstres à Buenos Aires et une forte répression, ravive le souvenir traumatique de cette période, faisant craindre, à chaque fin d’année, un regain de colère sociale. Il y a vingt ans, le chômage avoisinait 20 %, et près de la moitié de la population était considérée comme pauvre. A l’époque, des magasins avaient été pillés, des files d’attente interminables s’étaient formées devant les banques, alors que le gouvernement avait gelé l’épargne de la population. Fernando de la Rua, le président, s’était échappé du palais présidentiel en hélicoptère. Le pays était entré en défaut de paiement, le plus colossal de l’histoire : 100 milliards de dollars (88,5 milliards d’euros, au cours actuel).

Il vous reste 68.29% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Source

L’article Argentine : de l’explosion sociale de 2001 à 2021, l’histoire d’une crise est apparu en premier sur zimo news.