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En Inde, les agriculteurs quittent New Delhi au terme d’un an de manifestations contre la réforme agraire de Narendra Modi

Des agriculteurs indiens dansent et célèbrent leur lutte victorieuse, près de New Delhi (Inde), le 11 décembre 2021. ALTAF QADRI / AP

Après une année de mobilisations et une lutte finalement victorieuse, ils retournent dans leurs champs. Des milliers d’agriculteurs indiens empaquetaient leurs affaires et démontaient les villages de tentes, samedi 11 décembre, à la périphérie de New Delhi, afin de rentrer chez eux au terme d’une année de manifestations contre la politique agraire du gouvernement. Des centaines d’entre eux dansaient et célébraient leur « victoire », samedi matin, au moment de lever les barrages routiers et de démanteler leurs abris de fortune sur de grandes autoroutes.

Le premier ministre, Narendra Modi, avait fait voter par le Parlement le mois dernier l’abrogation des trois réformes agraires qui, selon les manifestants, permettraient aux entreprises privées de contrôler le secteur agricole du pays. Cependant, les protestataires avaient d’abord refusé de quitter leurs campements, mettant en avant d’autres revendications, comme une garantie de prix minimaux fixes sur leurs produits agricoles.

Le gouvernement a promis la constitution d’une commission sur le sujet et s’est engagé à l’arrêt des poursuites contre les agriculteurs qui brûlent les chaumes des cultures, accusés de polluer l’air de New Delhi chaque hiver.

Plus grande crise pour le gouvernement de Narendra Modi

Les autorités ont aussi accepté le versement de compensations aux familles des centaines d’agriculteurs qui, selon eux, sont morts pendant les manifestations ainsi que l’arrêt des procédures criminelles contre les manifestants.

Ce mouvement des agriculteurs, la plus grande crise pour le gouvernement de M. Modi depuis son arrivée au pouvoir, souligne à la fois la crise structurelle traversée par l’agriculture paysanne et le manque d’empathie et de dialogue de la part du premier ministre, qui avait pourtant promis, lors de son élection en 2014, de doubler leurs revenus d’ici à 2022.

Les agriculteurs représentent près de la moitié de la population – 650 millions d’Indiens, mais seulement 14 % du produit intérieur brut (PIB). Ils détiennent des parcelles de plus en plus petites et sont de plus en plus endettés sous la pression d’un mode de production intensif issu de la « révolution verte » des années 1960.

Les lois agricoles voulues par M. Modi avaient été votées en septembre 2020 pour autoriser les agriculteurs à vendre leur production aux acheteurs de leur choix, plutôt que de se tourner exclusivement vers les marchés contrôlés par l’Etat leur assurant un prix de soutien minimal (PSM) pour certaines denrées. Nombre de petits exploitants agricoles y étaient opposés, s’estimant menacés par cette libéralisation qui, disaient-ils, risquait de les obliger à brader leurs marchandises aux grandes entreprises.

Après des manifestations dans le Pendjab et le Haryana, dans le nord du pays, des dizaines de milliers d’agriculteurs s’étaient dirigés vers la capitale, où ils avaient été violemment repoussés par la police, marquant le début d’une impasse entre les deux parties qui a duré un an.

Depuis sa réélection, en mai 2019, M. Modi joue une stratégie de tensions, exacerbe les antagonismes pour discréditer les opposants à ses réformes. En décembre 2019, une loi attribuant la nationalité indienne aux réfugiés, sauf s’ils sont musulmans, avait suscité un mouvement de protestation d’une ampleur inédite dans tout le pays. Durant des mois, des Indiens étaient descendus dans la rue et la contestation n’avait pris fin qu’en raison de l’arrivée de l’épidémie de Covid-19 et le confinement général ordonné par le premier ministre.

Le Monde avec AFP

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