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Présidence française de l’UE : un “effet d’aubaine” pour Emmanuel Macron

Publié le : 09/12/2021 – 13:51

Alors qu’Emmanuel Macron doit détailler jeudi ses priorités pour la présidence française du Conseil de l’Union européenne, France 24 fait le point sur les enjeux de ce mandat et les dossiers chauds sur lesquels la France compte avancer avec Patrick Martin-Genier, spécialiste des questions européennes.

Ce n’était pas arrivé depuis 2008. La France prendra le 1er janvier 2022 la présidence du Conseil de l’Union européenne. Suivi du plan de relance, application du Pacte vert, réforme de Schengen, régulation du numérique, salaire minimum européen : pendant six mois, Paris aura la lourde tâche de trouver des compromis et de donner un nouvel élan à ces dossiers phares.

Les marges de manœuvres françaises resteront toutefois limitées. Si la présidence tournante permet de mettre sur la table certains dossiers jugés prioritaires, trouver un compromis peut prendre plusieurs années. La France sera en outre tenue de composer avec une Europe profondément divisée et encore secouée par la crise migratoire à la frontière entre la Pologne et la Biélorussie.

Européen convaincu, Emmanuel Macron devrait, jeudi 9 décembre, expliquer l’importance que revêt cette présidence semestrielle tournante lors d’une conférence de presse à l’Élysée.

Quels sont les grands enjeux de cette présidence pour la France ? Est-elle une chance pour le chef de l’État à quatre mois de l’élection présidentielle ? Éléments de réponse avec Patrick Martin-Genier, spécialiste des questions européennes et auteur de « L’Europe a-t-elle un avenir ? » (éd. Studyrama).

France 24 : À quoi sert la présidence de l’Union européenne ?

Patrick Martin-Genier : Il s’agit ici de présider le Conseil des ministres et non pas le Conseil européen des chefs d’État et de gouvernement. Le Conseil des ministres est une instance qui participe au processus législatif avec le Parlement européen.

La France va présider cette instance jusqu’au 30 juin 2022, ce qui lui permettra d’insister sur certains objectifs stratégiques compatibles avec les priorités de la Commission européenne, comme le Pacte vert ou la construction d’une Europe de la santé. Nous ne sommes pas encore sortis de la crise liée à la pandémie de Covid-19 et les Européens se sont aperçus qu’ils devraient renforcer leurs compétences en matière de santé.

Quels sont les dossiers prioritaires pour la France ?

Le président Macron compte avancer sur le volet social de l’Europe avec l’idée d’un salaire minimum européen. Cependant, il y a des désaccords parmi les 27 car cela reste une compétence qui relève essentiellement des syndicats et des partenaires sociaux. Le chantier est lancé mais on n’y arrivera pas en six mois.

Il y a également la question du numérique. L’Europe doit permettre au plus grand nombre d’accéder à ces outils tout en luttant contre ses dérives, notamment en protégeant les enfants et la vie privée. C’est une priorité qui est en phase avec l’agenda de la Commission européenne.

>> À voir : « Géants du numérique : l’Europe tente de les dompter »

Il devrait également y avoir une relance sur la question de la défense européenne. Tout le monde est d’accord pour dire qu’il faut renforcer la stratégie militaire et diplomatique de l’UE. Ce sont les priorités de la présidence française mais là encore, il faut garder à l’esprit que six mois, cela passe très vite.

Selon vous, cette présidence française sera-t-elle également une bonne occasion d’évaluer les capacités du nouveau couple franco-allemand à travailler ensemble ?

Tout à fait. On voit arriver en Allemagne une équipe relativement peu expérimentée. La ministre des Affaires étrangères n’a par exemple jamais exercé de fonctions ministérielles contrairement au nouveau chancelier, Olaf Scholz, qui a été ministre des Finances et a une expérience européenne.

>> À voir, notre Débat : « Olaf Scholz, un nouveau départ ? Covid-19, écologie, budget, Europe : les défis à venir »

Cette présidence française sera donc l’occasion de tester ce nouvel attelage et de voir surtout quelles sont les priorités du nouveau gouvernement allemand. Sur la question du déficit public et de l’endettement européen, il pourrait y avoir des divergences avec le nouveau ministre des Finances, le libéral Christian Lindner, qui est favorable au retour à une orthodoxie très stricte sur le plan budgétaire. L’atout de la France est qu’Emmanuel Macron a désormais une grande expérience de l’Europe.

Faut-il voir dans ce calendrier européen une aubaine pour Emmanuel Macron en vue de l’élection présidentielle en France ?

Oui, il y a un effet d’aubaine pour lui avec cette gestion française de l’Union européenne et l’élection présidentielle au même moment. Cependant, il me semble que les Français sont assez grands pour faire la distinction entre ce qui relève de chantiers européens et ce qui relève de la politique intérieure. Par ailleurs, cela peut être également risqué pour Emmanuel Macron, qui devra faire face à des désaccords avec ses partenaires européens.

Cette présidence de l’UE renforce en effet la stature internationale du président de la République par rapport à d’autres candidats qui n’ont pas cette expérience. Cela dit, la démocratie est faite de telle façon que si Emmanuel Macron est réélu, il achèvera ce mandat mais si un autre candidat l’emporte, il en prendrait immédiatement la suite avec les services diplomatiques à Bruxelles et le secrétariat général des Affaires européennes à Paris. Tout sera prêt, quel que soit le candidat qui sera élu au mois d’avril 2022.

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