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Le vote pour l’extrême droite au Chili est « le signal d’un retour à l’ordre »

Le candidat d’extrême droite à la présidence du Chili, José Antonio Kast, lors d’une réunion avec les dirigeants du comité du logement d’Akun Ruka, à Santiago, le 23 novembre 2021. PABLO VERA / AFP

Un apparent grand écart : le Chili a placé en tête du premier tour de l’élection présidentielle, dimanche 21 novembre, le candidat d’extrême droite José Antonio Kast (27,9 %), admirateur du général Augusto Pinochet (1973-1990) et opposé à la rédaction d’une nouvelle Constitution. Pourtant, un an plus tôt, en octobre 2020, 78 % des Chiliens avaient voté lors d’un référendum pour l’élaboration d’un nouveau texte destiné à enterrer la loi fondamentale actuelle, héritée de la dictature. En mai 2021, une Assemblée constituante franchement marquée à gauche avait même été désignée.

Stéphanie Alenda, sociologue à l’université Andrés Bello de Santiago, revient pour Le Monde sur ce « paradoxe » qui caractérise la campagne. Le 19 décembre, M. Kast affrontera au second tour le député et ex-leader étudiant Gabriel Boric (gauche, 25,8 % au premier tour).

Comment expliquer le score de l’extrême droite, à contre-courant des changements induits par le mouvement social contre les inégalités de 2019 ?

On peut expliquer ce paradoxe par une sorte de signal de retour à l’ordre, en faisant le parallèle avec la France et les événements de mai 1968, suivis de l’élection de la droite. Concernant la révolte sociale de 2019, les petits commerçants situés dans la zone de manifestation de Santiago, pour qui la mobilisation a eu des retombées économiques négatives, ont, par exemple, commencé à avoir une visibilité médiatique. Une partie de l’opinion publique est beaucoup plus critique envers la mobilisation [qui se poursuit, dans une moindre mesure, tous les vendredis] et moins tolérante envers les violences qu’elle a pu générer.

Or, la question du maintien de l’ordre et du respect de l’Etat de droit est centrale dans le discours de José Antonio Kast, avec cette sensation que le pays n’est pas tenu. De même pour les incidents violents qui ont eu lieu dans le sud du Chili, autour du conflit mapuche [population indigène qui réclame la restitution des terres ancestrales], en partie infiltré par des groupes armés. C’est dans cette région que José Antonio Kast a remporté le plus grand nombre de voix.

La thématique de l’ordre est tellement passée au premier plan du débat que le candidat de gauche, Gabriel Boric, est en train de reprendre à son compte, dans l’entre-deux tours, cet agenda de la sécurité, en mettant l’accent sur les victimes de la délinquance. En parallèle, il y a aussi une certaine perte de confiance de la population dans l’Assemblée constituante, alimentée par les querelles internes pendant l’adoption de son règlement. Les Chiliens doutent de sa capacité à améliorer la situation du pays. Le contexte économique marqué par l’inflation explique aussi le résultat du premier tour : José Antonio Kast a rencontré un certain succès auprès des groupes socio-économiques plus vulnérables.

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