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Après le Brexit, la France prête à lâcher sur les bateaux ?

Deux pêcheurs français travaillent à bord du chalutier « Le Chant des Sirènes », à la limite des eaux franco-britanniques, le 9 novembre 2021. NICOLAS GARRIGA / AP

D’une petite phrase, jeudi 18 novembre, Annick Girardin a mis le feu aux poudres. « Je vais donc être franche avec vous, il nous faut nous préparer à ne pas obtenir tout ce que nous attendions. » La ministre de la mer anticipait que les Britanniques n’attribueraient sans doute pas toutes les licences de pêche demandées par les Français et évoquait de possibles compensations financières pour mettre fin à la vie de certains bateaux. « Je sais combien ce sera un crève-cœur », commentait-elle. Elle affirmait disposer d’une enveloppe de 40 millions d’euros.

Sur le fond, cette phrase n’avait rien de nouveau. Avec le Brexit, la France a créé un fonds d’indemnisation, sachant pertinemment qu’un certain nombre de pêcheurs allaient y perdre. Mais, en pleine période préélectorale, et après de fortes tensions ces dernières semaines sur ce dossier, la déclaration a été reçue comme un aveu de faiblesse. « Emmanuel Macron a capitulé », a lancé la candidate du Rassemblement national, Marine Le Pen. Michel Barnier, candidat à l’investiture du parti Les Républicains pour la présidentielle et ancien négociateur du Brexit, qui devrait pourtant connaître le dossier par cœur, a, lui aussi, fustigé « le renoncement » du gouvernement. Vendredi, le chef de l’Etat a tenté de redresser la barre : « Il n’y a ni renoncement ni reculade. On continue à la fois la négociation et la pression. »

150 petits bateaux

La dispute est plus symbolique qu’économique : elle concerne environ 150 bateaux de petite taille. Depuis le Brexit, le délicat équilibre du partage des eaux entre le Royaume-Uni et l’Union européenne (UE) a été remis en cause. Dès le référendum britannique pour la sortie de l’UE en 2016, le dossier a été l’un des plus compliqués à gérer. Il s’est débloqué le 24 décembre 2020, quand les équipes de négociateurs ont discuté de la distribution des quotas espèce par espèce jusqu’au petit matin, arrachant de justesse un accord.

Si une solution a été trouvée sur le papier, sa mise en œuvre est aujourd’hui au cœur du problème. L’immense majorité des bateaux, ceux qui pêchent à plus de 12 milles des côtes, ont droit à une licence automatique pour aller dans les eaux britanniques. C’est sur cette base que les Britanniques proclament avoir attribué « 98 % » des licences demandées par les Européens, un peu plus de 1 800 au total, dont près de la moitié pour la France.

La bataille concerne les zones où les autorités britanniques ont une marge d’appréciation. La première se situe entre 6 et 12 milles de leurs côtes : 104 licences ont été obtenues par la France, mais « il en manque encore 54 », affirme Mme Girardin. Jersey est l’autre point de blocage : 116 licences définitives ont été obtenues, mais 46 ne sont que provisoires et au moins 13 considérées comme « prioritaires » par Paris ont été refusées. L’autre île anglo-normande, Guernesey, semble plus clémente, avec une « quarantaine de licences définitives », toujours selon la ministre, qui devraient être attribuées début décembre. Le principal problème concerne les bateaux de moins de 12 mètres, qui n’ont pas l’obligation de collecter les données satellites de leurs déplacements et peinent à prouver l’historique de leur pêche dans les eaux britanniques.

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