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L’opposant cubain Yunior Garcia Aguilera, arrivé en Espagne, admet un « coup dur » pour la dissidence

L’opposant cubain Yunior Garcia Aguilera lors d’une conférence de presse à son arrivée à Madrid, le 18 novembre 2021, après qu’il a quitté Cuba. BERNAT ARMANGUE / AP

L’opposant cubain Yunior Garcia Aguilera, principal organisateur d’une manifestation largement empêchée lundi à La Havane, est arrivé, mercredi 17 novembre, en Espagne, ont fait savoir des sources gouvernementales à l’Agence France-Presse.

Le dramaturge de 39 ans, devenu l’une des figures de proue de l’opposition au régime cubain, « est arrivé » en Espagne « en compagnie de son épouse avec un visa de touriste », ont encore déclaré ces sources, sans fournir plus de détails. « Nous sommes arrivés en Espagne, vivants, en bonne santé et avec nos idées intactes », a confirmé sur Facebook l’opposant cubain. « Merci à tous les amis qui se sont inquiétés pour nous », a-t-il ajouté, en saluant les « personnes qui ont rendu possible ce voyage ».

Plus tard, l’opposant a également tenu une conférence de presse à Madrid, au cours de laquelle il a reconnu : « Je le sais bien, je le conçois, c’est un coup dur » pour l’opposition cubaine. Il a toutefois dit qu’il parviendrait, de son côté, « à [se] pardonner de n’avoir pas eu le courage » d’être resté, et a « demandé pardon d’être humain, de penser à [sa] femme et à [sa] vie, et de [s]’être échappé » pour éviter de devenir « un mort-vivant, car c’est ce qui [l]’attendait à Cuba ».

Tentative de manifestation étouffée

L’opposant Yunior Garcia Aguilera maintenu chez lui par les forces de l’ordre pour l’empêcher de défiler dans La Havane, le 14 novembre 2021. RAMON ESPINOSA / AP

Selon lui, les Cubains ne peuvent pas « continuer à être des esclaves », mais ne doivent pas non plus « accéder à la liberté au prix (…) de centaines, voire de milliers de vies »« La seule manière d’éviter les deux est que la communauté internationale arrête de détourner le regard, arrête d’ignorer ce qui se passe à Cuba (…) Il faut arrêter de voir [l’île] avec le romantisme des années 1960 et reconnaître ce qu’est devenue ce qui était alors une révolution », a dénoncé l’opposant. « C’est devenu un mari violent frappant sa femme », a-t-il lancé en qualifiant le régime cubain de « tyrannie brutale ».

« En aucun cas, je ne vais renoncer ni me rendre », a-t-il assuré, ajoutant qu’il n’allait pas demander l’asile en Espagne et qu’il comptait revenir à Cuba lorsque sa vie et celle de son épouse « ne seront plus menacées ». L’Espagne lui a accordé un visa « pour qu’il n’ait pas de problèmes à Cuba », a expliqué jeudi le ministre de la présidence espagnol, Félix Bolaños, dans un entretien à la radio Onda Cero.

Yunior Garcia est le créateur du groupe Facebook de débat politique Archipiélago, qui a lancé un appel à manifester le 15 novembre à La Havane, afin de réclamer la libération des prisonniers politiques cubains. Cette manifestation, interdite par les autorités, a tourné court en raison d’une forte présence policière et de l’arrestation de meneurs de la dissidence cubaine, qui ont dénoncé une manœuvre pour « faire taire » les protestataires.

Craignant des violences lors de la manifestation, Yunior Garcia Aguilera avait annoncé la semaine dernière son intention de défiler seul, dimanche, dans la capitale cubaine, une rose à la main. Mais il n’a pas pu mener à bien ce projet, empêché de sortir de chez lui par les forces de l’ordre. Le dramaturge n’avait plus donné de nouvelles depuis cette date, suscitant l’inquiétude de son entourage et de ses soutiens.

« Je suis resté plusieurs jours sans moyen de communiquer, et j’ai besoin de me mettre à jour sur la situation des autres membres d’Archipiélago. Je vous raconterai bientôt mon odyssée », a expliqué le militant sur sa page Facebook.

« Marcher est un droit humain »

Né à Holguin, dans l’est de Cuba, Yunior Garcia Aguilera est connu depuis longtemps pour ses pièces de théâtre et ses scénarios pour la télévision et le cinéma. Mais il a endossé un autre rôle depuis le 27 novembre 2020, quand des centaines d’artistes ont manifesté pour réclamer plus de liberté d’expression : celui de porte-étendard d’une nouvelle génération critique du gouvernement, qui inclut artistes, journalistes et universitaires, la plupart hors partis politiques.

Des hommes tendent des drapeaux cubains devant les fenêtres du domicile de l’opposant Yunior Garcia Aguilera, le 14 novembre 2021, à La Havane, pour l’empêcher de communiquer avec l’extérieur. RAMON ESPINOSA / AP

Quand l’île a été secouée le 11 juillet par de vastes manifestations spontanées, inédites depuis la révolution de 1959, il n’a ainsi pas hésité à prendre part prendre au mouvement, tentant de réclamer quelques minutes d’audience à la télévision d’Etat. Il a fini arrêté, avant d’être libéré le lendemain. « Marcher est un droit humain, c’est un droit constitutionnel (…) et, donc, le lundi 15 novembre, je sortirai manifester pacifiquement comme nous en avions convenu », avait-il alors déclaré dans un entretien à l’AFP à la mi-octobre.

Les autorités cubaines accusent Yunior Garcia et les autres organisateurs de la manifestation de lundi d’être des agents entraînés et financés par Washington pour provoquer un changement de régime. Dimanche, le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, a appelé le gouvernement cubain « à respecter les droits des Cubains, en les laissant se rassembler de manière pacifique ».

Le Monde avec AFP

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