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Pourquoi il faut créer une « Grande Sécu »

Le modèle social français pourrait connaître une petite révolution. A la demande du ministre de la Santé Olivier Véran, le Haut conseil pour l’avenir de l’Assurance maladie (HCAAM) vient de dessiner plusieurs scénarios pour une meilleure articulation entre Sécurité sociale et assurances complémentaires dans le remboursement des soins. L’enjeu est crucial. La France a un système de financement unique au monde, qui mêle la solidarité nationale et les complémentaires. A la différence des autres pays, où les assurances privées remboursent les soins non couverts par la solidarité nationale, le système est mixte, chacun remboursant les mêmes soins. Exemple : la Sécurité sociale couvre 70 % du prix d’une consultation médicale et les complémentaires 30 %.

Un système délétère qui coûte cher à la collectivité

Ce système de double financement a des effets délétères sur l’efficience et l’équité des soins qui ont été largement démontrés : inflation des prix de certains biens, comme les lunettes, multiplication des frais de gestion (7,5 milliards d’euros en 2020 pour les complémentaires), cotisations plus élevées pour les personnes âgées, etc. Pis, cela freine des évolutions souhaitables, comme la généralisation du tiers payant ou un paiement plus qualitatif des médecins. Ce n’est pas un hasard si, durant la crise sanitaire, par souci d’efficacité, le remboursement des

soins les plus urgents a été garanti à 100 % par l’Assurance maladie : tests, vaccination, téléconsultations. Il est donc impératif de mieux séparer les domaines d’intervention. Trois des quatre scénarios présentés par les experts du HCAAM vont dans ce sens.

Trois scénarios pour créer une « Grande Sécu » 

Le scénario appelé « Grande Sécu », que propose l’Assurance maladie, couvre les soins à 100 % pour toute la population. Pour l’optique, le dentaire et les audioprothèses, cette couverture à 100 % ne concernerait toutefois que certains équipements, ce qui laisserait une petite place aux assurances complémentaires. Un autre scénario proche prévoirait que les remboursements à 100 % par la Sécu de l’optique, du dentaire et des audioprothèses seraient réservés aux personnes à bas revenu. Le troisième scénario, enfin, apparaît comme une réforme minimale, un préalable sur le chemin d’une « Grande Sécu », puisqu’il réserve la couverture à 100 % aux individus dont le reste à charge a atteint un certain plafond annuel (par exemple 2.000 euros). Une mesure en place dans la plupart des pays, et pour laquelle la crise épidémique a montré l’urgente nécessité. D’après l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, le reste à charge d’un malade du coronavirus peut dépasser 8.000 euros après un séjour de deux semaines. 

Par Brigitte Dormont, professeur à Paris Dauphine-PSL, spécialiste de la santé

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