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« En laissant les entreprises licencier massivement, les Etats-Unis ont pris le risque de casser le lien entre salariés et employeurs »

Des prospectus promouvant la qualité de travail au sein de l’entreprise Amazon, lors d’un salon de l’emploi à Leesburg (Virginie), le 21 octobre 2021. ANDREW CABALLERO-REYNOLDS / AFP

Il flotte comme un malaise sur le marché du travail aux Etats-Unis, longtemps considéré comme l’un des plus dynamiques au monde en raison de son extrême flexibilité. Des signes de dysfonctionnements apparaissent au moment où le pays sort de la crise liée au Covid-19. La croissance économique est bien là, les carnets de commandes se remplissent, les entreprises sont prêtes à recruter à tour de bras, mais voilà, des millions de salariés renoncent à se faire embaucher, tandis que des millions d’autres démissionnent à un rythme inédit. Un ressort semble s’être cassé.

Par rapport à la fin de 2019, cinq millions de salariés ont disparu des statistiques. Le taux de participation, c’est-à-dire la proportion d’Américains en âge de travailler qui ont un emploi, ou qui en cherchent activement un, a chuté à 61,6 % en septembre, deux points au-dessous de son niveau d’avant la crise. Il faut remonter aux années 1970 pour trouver de tels chiffres. Même si les pénuries de main-d’œuvre existent aussi en Europe, le taux de participation y progresse.

En juillet, Jerome Powell, le président de la Réserve fédérale (Fed), s’était ému de la situation lors d’une audition devant une commission sénatoriale. « Nous sommes à la traîne de tous les pays comparables en matière de participation au marché du travail, ce n’est clairement pas là où nous voulons être en tant que nation, pestait-il. Nous devons faire des efforts pour nous assurer que les gens réintègrent le marché du travail même s’ils ne peuvent pas retrouver leur ancien emploi. »

Automatisation des tâches routinières

Le phénomène interpelle d’autant plus que ce ne sont pas les offres d’emploi qui manquent. Actuellement 10,4 millions de postes sont à pouvoir. Faute de pouvoir recruter, les entreprises peinent à répondre à la demande et n’hésitent pas à accélérer l’automatisation des tâches routinières. Les caisses automatiques dans les magasins et les tablettes numériques dans les restaurants se développent à grande vitesse. Près de la moitié des postes qui étaient occupés par les 5 millions de salariés qui manquent toujours à l’appel, sont automatisables, selon les évaluations d’Oxford Economics. Leur disparition pourrait donc devenir définitive. Une bonne nouvelle pour la productivité, mais qui s’accompagnera, au moins dans un premier temps, par un rétrécissement du marché de l’emploi.

Celui-ci est d’autant plus perturbé qu’un nombre record de démissions sont enregistrées. En août, 4,3 millions de salariés ont quitté leur poste, selon les derniers chiffres du département du travail. Certains partent pour trouver un emploi mieux rémunéré, d’autres veulent changer de vie. Depuis avril, la tendance s’accélère. Dans la restauration, rien qu’en août, un salarié sur quatorze a donné sa démission. Des employeurs tentent de les dissuader en augmentant les salaires. En vain jusqu’à présent.

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