France World

Dans son bras de fer avec l’Occident, Erdogan veut déclarer dix ambassadeurs « personæ non gratæ »

Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a annoncé samedi 23 octobre avoir ordonné à son ministère des affaires étrangères de déclarer « personæ non gratæ » dix ambassadeurs qui ont appelé cette semaine à la libération immédiate d’Osman Kavala. Cet homme d’affaires et mécène turc est devenu la bête noire du régime turc, emprisonné depuis quatre ans sans jugement.

Dans un communiqué publié lundi soir, le Canada, la France, la Finlande, le Danemark, l’Allemagne, les Pays-Bas, la Nouvelle-Zélande, la Norvège, la Suède et les Etats-Unis avaient appelé à un « règlement juste et rapide de l’affaire » Osman Kavala. Dès le lendemain de leur communiqué, les ambassadeurs de ces dix pays avaient été convoqués par le ministre des affaires étrangères turc, Mevlüt Cavusoglu, qui jugeait « inacceptable » leur appel en faveur d’Osman Kavala. Le chef de l’Etat turc avait menacé jeudi d’expulser ces ambassadeurs.

Ces ambassadeurs « doivent connaître et comprendre la Turquie », a affirmé samedi M. Erdogan en les accusant « d’indécence ». « Ils devront quitter » le pays « s’ils ne le connaissent plus », a-t-il ajouté, sans donner de date précise pour l’exécution de sa demande de les voir déclarés « personæ non gratæ ».

L’article 9 de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques de 1961, complétée en 1963 par la convention de Vienne sur les relations consulaires, prévoit qu’un membre du corps diplomatique en mission peut être déclaré, sans motivation et instamment, persona non gratæ, amenant son rappel par le pays accréditant ou mettant fin à ses fonctions auprès de la mission.

Appel en faveur d’Osman Kavala

Osman Kavala, opposant de 64 ans, figure majeure de la société civile, est accusé depuis 2013 par le régime du président Erdogan de chercher à déstabiliser la Turquie. Il est notamment dans sa ligne de mire pour avoir soutenu en 2013 les manifestations antigouvernementales connues sous le nom de « mouvement de Gezi ». Puis il a été accusé d’avoir cherché à « renverser le gouvernement » dans le cadre de la tentative de coup d’Etat de 2016.

En décembre 2019, la Cour européenne des droits de l’homme avait ordonné sa « libération immédiate », en vain. Osman Kavala, qui a toujours nié les charges pesant contre lui, risque la prison à vie. Il comparaîtra de nouveau le 26 novembre, malgré les menaces européennes de sanctions contre Ankara. Le Conseil de l’Europe a récemment menacé la Turquie de sanctions, qui pourront être adoptées lors de sa prochaine session (30 novembre au 2 décembre) si l’opposant n’est pas libéré d’ici là.

La décision d’Ankara intervient quelques jours après que le GAFI, le Groupe d’action financière, a annoncé le placement du pays sous surveillance. La Turquie a rejoint la liste grise du GAFI pour ses manquements dans la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Elle y retrouve des pays comme le Panama, la Syrie, le Pakistan ou le Zimbabwe. Malgré « un certain nombre de progrès » dans ces domaines depuis 2019, a souligné l’organisation, « de sérieux problèmes demeurent ». La décision a été qualifiée d’« injuste » par le ministère des finances turc. Or la mise sur liste grise du GAFI peut avoir des conséquences sur les investissements étrangers dans le pays et aggraver la situation économique.

Le Monde avec AFP et Reuters

Source

L’article Dans son bras de fer avec l’Occident, Erdogan veut déclarer dix ambassadeurs « personæ non gratæ » est apparu en premier sur zimo news.