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La gestion « criminelle » de la pandémie de Jair Bolsonaro au Brésil

Tout faire pour tourner la page au plus vite. Ne surtout pas laisser les termes « crimes contre l’humanité », « négligence intentionnelle », « retards inexcusables » s’installer un peu plus longtemps dans l’opinion publique. Jair Bolsonaro avait bien une stratégie toute prête, mercredi 20 octobre, pour tenter de faire oublier la publication du rapport accablant de la commission d’enquête parlementaire (CPI) au Sénat sur la gestion de la pandémie.

Le président a passé la journée à présenter son nouveau programme social, créé pour remplacer la légendaire Bolsa familia (« bourse famille ») mise en place il y a quinze ans par son opposant, l’ex-président Luiz Inacio Lula da Silva, dit Lula. Comme par miracle, le programme Auxilio Brasil (« aide Brésil »), annoncé depuis des mois, a été révélé le jour même où « la gestion désastreuse et criminelle de la pandémie par le gouvernement Bolsonaro » faisait la une de tous les médias.

Le président brésilien Jair Bolsonaro, au palais présidentiel du Planalto à Brasilia, le 20 octobre 2021. UESLEI MARCELINO / REUTERS

Cette fois, il n’est cependant pas acquis que la parade du président d’extrême droite fonctionne. Un programme social, aussi bienvenu soit-il, peut difficilement faire oublier que près de 127 000 morts dus au Covid-19 (sur 604 000 décès à ce jour) auraient peut-être pu être évités si le chef de l’Etat avait agi différemment. Accusé d’avoir « délibérément exposé » les Brésiliens à une « contamination de masse » par le Covid-19, Jair Bolsonaro s’est dit « coupable d’absolument rien ». « Nous savons que nous avons fait ce qu’il fallait dès le début », a-t-il insisté, au cours d’une cérémonie officielle dans l’Etat du Ceara (nord-est).

Le rapport final de la CPI, présenté mercredi, le désigne pourtant comme « le principal responsable des erreurs du gouvernement pendant la pandémie ». Outre le « crime contre l’humanité », qui pourra être jugé à la Cour pénale internationale de La Haye, le rapporteur, le sénateur centriste Renan Calheiros, a retenu neuf chefs d’accusation allant du « charlatanisme » à l’« incitation au crime », en passant par des « infractions aux mesures sanitaires » et la « prévarication ».

« Cabinet parallèle »

Cette conclusion, basée à la fois sur des travaux scientifiques et une analyse détaillée de l’attitude du président, devrait obliger la justice à agir. Pour l’heure, les sénateurs sont néanmoins lucides sur les maigres chances de voir bientôt le président dans le box des accusés. « Jair Bolsonaro bénéfice d’une immunité et il est aujourd’hui protégé par le procureur de la République, qui reste un de ses meilleurs alliés. Mais cette immunité n’est pas éternelle et notre travail s’adresse à la justice brésilienne et internationale, explique au Monde le sénateur du Parti des travailleurs, Humberto Costa. Le haut-commissaire aux droits de l’homme de l’ONU, la Commission interaméricaine des droits de l’homme, comme la Cour pénale internationale vont recevoir une copie de ce rapport. Nous souhaitons à présent créer, au Sénat, un observatoire de cette commission pour accompagner les enquêtes judiciaires. »

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