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La grande solitude de la « lady » de Birmanie, détenue au secret

Des pancartes, brandies par un groupe d’ingénieurs, appellent à la libération de l’ancienne dirigeante birmane Aung San Suu Kyi, lors d’une manifestation contre le coup d’Etat militaire, à Naypyidaw, le 15 février 2021. STR / AFP

« Dame de Rangoun » au temps où elle était détenue par une précédente dictature, elle est aujourd’hui la « prisonnière de Naypyidaw » – du nom de la capitale de Birmanie. Détrônée par le coup d’Etat militaire du 1er février, l’ancienne dirigeante Aung San Suu Kyi vit à nouveau une période de réclusion totale. Le journal de l’opposition en exil The Irrawaddy redoute même que ce nouvel épisode de la vie de l’héroïne nationale puisse être le pire qu’elle ait jamais connu : « Sa détention dans un lieu inconnu et la volonté de l’emprisonner sous prétexte d’accusations fallacieuses indique que le général Min Aung Hlaing [l’auteur du coup d’Etat] est encore plus impitoyable que ses prédécesseurs. »

Elle est presque invisible. Tout juste la voit-on de temps en temps en photo, rares images qui la montrent, masquée et assise bien droite, sur le siège d’un tribunal à huis clos où elle enchaîne chaque semaine les audiences. Depuis sa mise à l’écart, elle doit répondre de onze charges d’accusation fantaisistes, concoctées par une parodie de justice.

Sa santé est vacillante : le 13 septembre, elle a dû renoncer à se rendre au tribunal, après avoir été victime de vertiges. Lundi 4 octobre, elle a demandé que sa présence ne soit requise in persona qu’une semaine sur deux : « Elle est affaiblie », a indiqué son avocat, Khin Maung Zaw.

« L’enfermer le plus longtemps possible »

Plus encore peut-être que les généraux de l’interminable tyrannie qui phagocyta le pouvoir entre 1962 et 2010, l’actuel dictateur en chef Min Aung Hlaing semble bien décidé à se débarrasser pour de bon de Mme Suu Kyi. Parmi les onze chefs d’inculpation qui pèsent sur elle – outre les charges de possession illégales de talkie-walkie –, les accusations de corruption pourraient lui valoir jusqu’à quinze années de prison.

Le régime a aussi réussi à persuader l’ancien « chef ministre » de la région de Rangoun, un ex-allié, de témoigner contre elle : Phyo Min Thein a raconté, le 1er octobre, devant les juges, qu’il avait autrefois donné à Mme Suu Kyi un pot-de-vin de 600 000 dollars (516 000 euros) et 11,4 kg d’or, en échange de son aide pour faire avancer des projets commerciaux. Réaction de la « lady », selon ses avocats : « Tout est cela est absurde ! »

A ces « absurdités », il faut ajouter d’autres charges, graves également : les accusations de « violations de secrets d’Etat », qui pourraient lui valoir quatorze années de prison supplémentaires. Comme le remarque Phil Robertson, directeur adjoint de l’ONG Human Rights Watch, « il est clair que la junte la voit comme la menace politique principale et veut l’enfermer le plus vite et le plus longtemps possible ».

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