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Nouvelle passe d’armes entre la Pologne et Bruxelles sur l’Etat de droit

Des manifestants protestent devant le Parlement polonais après l’adoption d’une loi considérée comme attentatoire à la liberté des médias, à Varsovie, le 11 août 2021. CZAREK SOKOLOWSKI / AP

La forte pression européenne exercée ces derniers mois a eu peu d’effet sur la Pologne, laissant présager une crise fondamentale sur la question de l’Etat de droit. Par un long courrier en date du lundi 16 août, le gouvernement ultranationaliste de Droit et justice (PiS) vient en effet d’opposer une fin de non-recevoir à la Commission européenne, qui le sommait de se conformer à deux décisions de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) pointant des atteintes à l’indépendance de la justice.

Dans un jugement au fond rendu le 15 juillet, les juges européens avaient notamment constaté que la chambre disciplinaire de la Cour suprême, rouage essentiel du régime disciplinaire des juges mis en place par le gouvernement national-conservateur, n’offrait « pas toutes les garanties d’impartialité et d’indépendance » et n’était « pas à l’abri d’influences directes ou indirectes des pouvoirs législatif et exécutif ». En outre, ils avaient exigé la suspension immédiate de ses activités, dans une ordonnance de référé rendue la veille à propos d’une affaire voisine.

Le tribunal constitutionnel polonais, proche du pouvoir, avait provoqué la sidération en adoptant, le 14 juillet, une décision qui, en les déclarant inconstitutionnelles, privait de tout effet dans l’ordre juridique interne les ordonnances de référé de la CJUE concernant les réformes judiciaires. Un mois plus tard, Varsovie enfonce le clou et fait savoir qu’il n’entend pas faire machine arrière.

De la « poudre aux yeux »

Le gouvernement polonais a certes indiqué, dans son courrier, que la chambre disciplinaire, « dans sa forme actuelle », serait amenée à disparaître « au cours des mois à venir ». Mais cette annonce, au-delà du flou qui l’entoure, est « tout à fait insuffisante », estime Laurent Pech, professeur de droit européen à l’université du Middlesex, à Londres, qui n’hésite pas à parler de « poudre aux yeux ». « La chambre disciplinaire n’est qu’un élément du dysfonctionnement plus général condamné par la CJUE », confirme Wojciech Sadurski, enseignant aux universités de Sydney et de Varsovie.

Le tribunal constitutionnel polonais pourrait nier toute autorité à la CJUE dans les affaires ayant trait à l’indépendance de la justice

En outre, le fait que le gouvernement continue de contester la prééminence du droit européen sur la Loi fondamentale polonaise annonce « une confrontation majeure sur la primauté du droit de l’Union », pierre angulaire de l’ordre juridique sur le Vieux Continent, s’inquiète une source européenne. Dans la continuité de sa décision du 14 juillet, le tribunal constitutionnel polonais, à l’issue d’une audience attendue pour la fin du mois d’août, pourrait en effet nier toute autorité à la CJUE dans les affaires ayant trait à l’indépendance de la justice.

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