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« Il y a tant à faire avant de craquer » : trois semaines après les inondations mortelles, Ahrweiler peine à se remettre

Entre chien et loup, quand les centaines de bénévoles ont délaissé le terrain, Bad Neuenahr-Ahrweiler (Rhénanie-Palatinat) prend des airs de ville fantôme. Trois semaines après la vague meurtrière de la nuit du 14 au 15 juillet, la petite rivière Ahr a retrouvé son lit mais les habitants cherchent encore le repos. Dans cette ville de 27 500 âmes, l’eau est montée de 7 mètres en moins d’une heure, inondant tout, jusqu’aux premiers étages des habitations. Sous cette ligne, tout est désolation. Comme dans un film d’épouvante, le vent siffle dans les immeubles éventrés, déjà vidés des débris de la catastrophe. Au-dessus, on essaie de vivre. L’électricité n’a toujours pas été rétablie, alors quelques bougies vacillent aux fenêtres.

Dans les rues de Bad Neuenahr-Ahrweiler, en Rhénanie-Palatinat, le 1er août 2021, une partie des meubles et des encombrants a été nettoyée, mais il reste beaucoup à faire. FERHAT BOUDA / AGENCE VU POUR « LE MONDE » Des membres de l’association kurde Afrin viennent de Bonn pour aider les habitants de Bad Neuenahr-Ahrweiler chaque week-end. FERHAT BOUDA / AGENCE VU POUR « LE MONDE »

Des visages blafards jaillissent au passage des rares véhicules – la peur des pillards… En tee-shirt kaki, Kai Kaltenschnee monte la garde devant le dépôt de nourriture et de matériel de première nécessité. Trois nuits déjà à bondir au moindre bruit. « Qu’est-ce que tu fais là, toi ? Tu veux une lampe de poche ? On en a reçu 300 hier ! J’ai mis des piles dans chacune d’elles. » L’ancien militaire répond à Daniel Schmitt, un colosse en salopette, un peu pataud. Il est sorti de la pénombre comme un zombie : « Père est malade, Mère ne peut pas venir alors c’est à moi d’aller au cimetière », répète-t-il mécaniquement.

Reportage : « On a tout perdu. Mais au moins, il nous reste la vie » : Bad Neuenahr-Ahrweiler, ravagé par les inondations

Le quadragénaire nous mène dans les ruelles désertes jusqu’à un chaos de pierres tombales, où l’on enjambe des croix, des stèles. Pendant la nuit de la catastrophe, les voisins ont vu les flots emporter des cercueils. Devant chaque nom, il connaît une histoire de famille ; il allume des cierges et prononce de rapides prières. « Au boulot, on récupère des ordinateurs et on nettoie la boue pour essayer de sauver ce qu’il y avait dans la mémoire ; dans le cimetière, il y a la mémoire de la ville, mais là aussi, la boue a tout fait disparaître. »

Plus on s’approche de la rivière, plus le sol est meuble. La fange, en partie contaminée par les eaux usées et les huiles de chauffage, s’accumule sur près de 2 mètres. Jusqu’à l’arrivée, le 31 juillet, du premier bataillon du génie militaire de la Bundeswehr, qui a reçu comme mission de déblayer le cimetière, il y avait des voitures renversées au milieu des sépultures. A l’heure actuelle, aucun enterrement n’a pu avoir lieu pour les 139 morts de la ville. Tous n’ont pas été identifiés. Au total, on déplore 186 victimes en Allemagne et 55 personnes sont encore portées disparues.

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