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« Projet Pegasus » : en Inde, un Etat dans l’Etat prêt à tout pour protéger le premier ministre

Par Julien Bouissou

Publié hier à 13h51, mis à jour hier à 16h36

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EnquêteEn ciblant les numéros de nombreux journalistes, diplomates étrangers, militants, humanitaires ou politiciens de tous bords, le client indien de NSO Group semble être avant tout au service de Narendra Modi.

L’Inde, qui aime se définir comme étant la plus grande démocratie au monde, a été placée sous une surveillance massive. Les autorités ont sélectionné à partir de 2017 plus de 2000 numéros, en Inde et au Pakistan, comme cibles potentielles du logiciel espion Pegasus, commercialisé par la société israélienne NSO Group. C’est ce que révèle une fuite de données issues de NSO consultées par Forbidden Stories et Amnesty International et partagée avec seize médias du monde entier, dont Le Monde. L’utilisation du logiciel commence juste après la visite de M. Modi en Israël, en juillet 2017, la première d’un chef de gouvernement depuis l’indépendance de l’Inde, en 1947, et lors de laquelle plusieurs accords de coopération ont été signés, notamment à propos de la lutte contre le terrorisme.

Parmi les personnalités visées, on trouve pêle-mêle des journalistes, des défenseurs des droits humains, des diplomates étrangers, des responsables locaux d’ONG telles que la fondation Bill & Melinda Gates, des responsables politiques, dont le leader de l’opposition, Rahul Gandhi, le premier ministre pakistanais, Imran Khan… et même le jardinier d’un ministre indien. Opposants comme alliés, personne ne semble échapper à cette potentielle mise sous surveillance. Sont concernés des responsables d’une agence indienne de sûreté et deux ministres de M. Modi, Prahlad Singh Patel et Ashwini Vaishnaw. Un Etat dans l’Etat s’est installé à la tête de l’Inde, invisible de tous et échappant à tout contrôle démocratique.

Sans surprise, le Pakistan est le pays le plus scruté. Les numéros d’Imran Khan et de plusieurs de ses ambassadeurs en Inde apparaissent sur la liste comme des cibles potentielles. Des dizaines d’autres diplomates et ambassadeurs postés à Delhi y figurent également, qu’ils soient d’Iran, d’Afghanistan, de Chine, du Népal ou encore d’Arabie saoudite. Au Cachemire, plusieurs leaders séparatistes, dont Mirwaiz Umar Farooq, et des défenseurs des droits humains sont également pris pour cible potentielle. L’analyse du smartphone de Syed Abdul Rehman Geelani, ancien professeur à l’université de Delhi qui s’est battu pour la libération de prisonniers politiques au Cachemire, montre qu’il a été infecté depuis 2017 à de nombreuses reprises, jusqu’à sa mort en octobre 2019. C’est avec ce type de message que l’Etat indien est parvenu à le faire cliquer sur un lien piégé : « L’Union Européenne montre son soutien inconditionnel à l’Inde sur la question du Cachemire pendant la visite du PM Modi. »

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