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L’obsession du Sahara occidental pousse le Maroc à tenter d’espionner le maire d’Ivry-sur-Seine

Au Maroc, « la monarchie, la religion et le Sahara occidental sont des tabous absolus », ont coutume de dire journalistes et opposants travaillant dans le pays. Hors de ses frontières, la question du Sahara occidental relève de l’obsession. Colonie espagnole jusqu’en 1976, ce vaste territoire désertique est revendiqué à la fois par Rabat, qui contrôle majoritairement la zone et propose de lui conférer un statut d’autonomie, et par les indépendantistes du Front Polisario, qui, soutenus par l’Algérie, réclament la tenue d’un référendum d’autodétermination.

Cette obsession a conduit les services de sécurité marocains à s’intéresser au téléphone du maire d’Ivry-sur-Seine, une commune du Val-de-Marne, en banlieue parisienne. Cette ville de 60 000 habitants, bastion du Parti communiste français, semble susciter beaucoup d’intérêt dans le royaume.

Le 6 juillet 2021, une semaine après un conseil municipal mouvementé, Philippe Bouyssou, le maire, a été la cible d’une tentative d’infection détectée par Amnesty International. via le puissant logiciel espion Pegasus, fourni par l’entreprise israélienne NSO Group.

A l’ordre du jour de la réunion du 30 juin figurait, parmi soixante-deux autres points, la mise en délibéré d’une subvention de 5 000 euros en faveur d’actions éducatives pour des enfants sahraouis. Une élue LRM de l’opposition a contesté le versement et lu un texte. Devant le gymnase où se tenait le conseil municipal, plusieurs dizaines de personnes favorables au maintien du Sahara occidental au sein du Maroc ont manifesté, certaines s’introduisant même dans la salle. Le maire a donné l’ordre d’évacuer et fait voter le huis clos. Moins d’une heure plus tard, le discours de l’élue LRM était diffusé sur des sites Internet marocains.

« Traîtres à la patrie »

L’opposante reproche notamment à la ville son soutien au militant sahraoui Naâma Asfari. Celui-ci a été arrêté en novembre 2010, à Laâyoune, au Sahara occidental, la veille du démantèlement du camp de Gdeim Izik, érigé un mois plus tôt pour protester contre les discriminations dont les Sarahouis s’estiment victimes. Et a été condamné, en 2013, à trente ans d’emprisonnement par un tribunal militaire, au terme d’un procès dénoncé comme inéquitable. Un verdict qui n’est pas susceptible d’appel.

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Au cœur du combat mené par ses soutiens, son épouse : Claude Mangin. Cette habitante d’Ivry-sur-Seine, ancienne professeure d’histoire-géographie, âgée de 65 ans, est une des bêtes noires de la monarchie marocaine. D’après l’enquête menée par Le Monde et le consortium de médias coordonné par Forbidden Stories, avec l’appui du Security Lab d’Amnesty International, elle est régulièrement surveillée par Rabat depuis octobre 2020.

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