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« L’EI ne dispose plus de capacité de projection sur le sol européen »

Gilles de Kerchove, le coordinateur de l’UE pour la lutte contre le terrorisme, Bruxelles, le 2 juillet 2021. SEBASTIEN VAN MALLEGHEM / RENEGADES AGENCY POUR « LE MONDE »

Nommé en 2007 et atteint par la limite d’âge, Gilles de Kerchove va abandonner à la fin du mois d’août sa fonction de coordinateur européen de la lutte antiterroriste. L’heure d’un bilan.

Comment évaluez-vous la menace terroriste aujourd’hui ?

L’Europe a significativement réduit ses vulnérabilités mais il demeure des incertitudes. Daech [acronyme arabe de l’organisation Etat islamique] n’a pas totalement disparu, la menace reste complexe, diffuse. Des combattants sont encore actifs en Syrie et en Irak, soit dans la nature, soit détenus par les forces kurdes. D’autres groupes s’affirment au Sahel, en Afrique de l’Ouest, de l’Est, au Mozambique, au Congo, etc. Il reste donc indispensable de prévenir l’apparition, sur ce continent, d’un nouveau « califat », qui pourrait menacer directement l’Europe.

Il est toutefois évident que l’Etat islamique ne dispose plus de sa capacité à projeter des terroristes sur le sol européen, ce qui est le résultat de l’action menée par la coalition internationale. Mais il reste des acteurs isolés, sans lien direct avec l’organisation.

Un terrorisme d’extrême droite a émergé dans plusieurs pays. L’Europe vous semble-t-elle prête à affronter cette autre menace ?

J’ai soulevé ce problème il y a trois ans. Il ne concerne évidemment pas tous les pays membres mais certains considèrent, comme l’Allemagne, qu’il est aussi inquiétant que le djihadisme. Même si ce dernier représente toujours, selon moi, la menace principale, nous devons être attentifs. Cette mouvance comporte 50 nuances de gris mais elle est fédérée par l’Internet et la théorie du grand remplacement y gagne du terrain.

Le traité de Lisbonne a-t-il corseté votre action, lui qui n’a pas tranché, dans le domaine du terrorisme et du renseignement, entre la logique nationale et celle de l’Union européenne (UE) ?

La coopération entre les services de renseignement intérieur s’est considérablement développée depuis l’attentat contre Charlie Hebdo. Ils coopèrent certes en dehors du cadre institutionnel de l’Union mais de façon structurée et coordonnée. Créé après les attentats de 2001, le groupe antiterroriste [GAT] a offert une enceinte d’échanges entre les différents services de renseignement, élargie aux Etats associés à l’espace Schengen. Cela a marqué une évolution significative dans la culture de ces services. Le mandat d’arrêt européen a, lui, inséré un changement fondamental, en introduisant un mécanisme de magistrat à magistrat, sans interférence politique.

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