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Le Bangladesh fait son entrée à Cannes avec “Rehana Maryam Noor” d’Abdullah Mohammad Saad

Publié le : 08/07/2021 – 10:38Modifié le : 08/07/2021 – 10:41

Le film indépendant « Rehana Maryam Noor » a été projeté mercredi à Cannes, une première pour un film bangladais dans l’histoire du festival. France 24 a rencontré son réalisateur et scénariste, Abdullah Mohammad Saad.

Le Festival de Cannes a ceci de magique qu’il permet aux jeunes talents de la réalisation du monde entier de côtoyer, durant quelques jours, les plus grandes vedettes du cinéma et d’être presque autant considérés qu’elles.

Bien sûr, l’œil des photographes ne retient que le côté glamour des stars sur le tapis rouge et de la montée des marches, mais le Festival de Cannes permet avant tout d’explorer le monde du cinéma et de découvrir de nouveaux talents.

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À 36 ans, le scénariste et réalisateur Abdullah Mohammad Saad est l’un d’eux. Son film, « Rehana Maryam Noor », fait partie de la sélection « Un certain regard » et est devenu, mercredi 7 juillet, le premier film bangladais projeté en sélection officielle à Cannes.

Il s’agit du second film d’Abdullah Mohammad Saad après « Live from Dhaka », sorti en 2016, qui lui avait valu le prix du meilleur réalisateur au Festival international du film de Singapour avant d’être présenté dans plusieurs festivals européens. Comme son premier film, « Rehana Maryam Noor » repose sur des personnages à fort caractère, à l’image de sa protagoniste jouée par l’exceptionnelle Azmeri Haque Badhon.

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Celle-ci interprète le rôle de Rehana, une mère célibataire professeure adjointe dans un hôpital universitaire qui lutte pour mener de front sa vie professionnelle et sa vie personnelle. À ses défis quotidiens s’ajoute bientôt un combat pour la justice, lorsqu’elle tombe sur une étudiante en larmes, victime d’une agression sexuelle par un professeur.

Le film aborde des thèmes bien connus : des femmes obstinées se battant contre l’injustice dans un monde sexiste. Mais le personnage complexe de Rehana, incorruptible mais prête à mentir pour parvenir à ses fins, n’entre pas forcément dans la représentation habituelle d’une héroïne féministe.

France 24 : Comment avez-vous accueilli la sélection de votre film au Festival de Cannes ? Et comment a réagi le Bangladesh ?

Abdullah Mohammad Saad : C’est vraiment un grand honneur d’être présent à Cannes. Faire un film demande beaucoup de sacrifices, de dévouement, de temps et d’énergie, donc quand quelque chose comme cela arrive, c’est un encouragement à continuer dans cette voie.

Les gens au Bangladesh étaient fous de joie. C’était davantage une consécration pour eux que pour moi. Cette année marque le 50e anniversaire de l’indépendance du Bangladesh et la sélection de mon film a permis de donner confiance au cinéma bangladais.

Quelles difficultés avez-vous rencontrées pour financer votre film ?

Bien sûr, nous avons davantage de difficultés au Bangladesh que dans d’autres industries cinématographiques plus avancées, mais le financement du film n’a pas vraiment été un problème. J’aime travaillé avec mes amis et j’ai eu la chance d’avoir à mes côtés mon producteur, Jeremy Chua, qui m’a aussi beaucoup aidé sur l’écriture.

Mon actrice principale a aussi donné tout ce qu’elle avait pour ce film et a toujours répondu à nos attentes. Mon caméraman a fait de la musculation pendant plus d’un an parce que je lui avais dit qu’il fallait être particulièrement en forme pour ce tournage. Ce film est le fruit d’un travail collectif.

Votre film est fascinant dans sa façon d’explorer les personnages. D’où vous vient cet intérêt ?

J’ai grandi avec trois grandes sœurs. Elles sont très courageuses, belles, dynamiques et intelligentes. Elles ont toujours dominé dans la famille et ont eu une grande influence sur moi. Je les ai observées de près, en tant que filles, sœurs, mères et femmes actives. Ça m’a toujours fasciné. Et c’est ainsi qu’est né mon film : j’ai toujours eu en tête cette image d’une femme obstinée. J’avais envie de voir ce qu’elle avait dans le ventre et jusqu’où elle pouvait aller.

Rehana n’est pas ce qu’on pourrait appeler une ambassadrice du mouvement MeToo. Était-ce important pour vous de créer un personnage complexe et ambivalent ?

Mon film est une exploration de la nature humaine. Il y a bien évidemment un aspect politique, mais mon intention n’était pas de faire un film politique. Je ne me considère pas comme un réalisateur engagé. Je suis davantage intéressé par les personnages et leurs complexités. Donc je n’ai pas essayé de faire de Rehana la représentante d’un mouvement ou d’une cause.

Y a-t-il malgré tout quelque chose en particulier sur votre pays que vous vouliez partager ?

Ce que j’ai décrit dans mon film, je l’ai forcément tiré de mes expériences ou de mes observations dans mon pays. Mais j’avais aussi envie que tout le monde puisse s’identifier à mon personnage principal, pas seulement les Bangladais. Quand un ami m’a dit que son histoire pouvait arriver n’importe où, même en France ou ailleurs en Europe, je me suis dit que j’étais peut-être parvenu à raconter une histoire universelle.

Pouvez-vous nous parler de la façon dont votre actrice principale a participer à la création de son personnage ?

Quand je l’ai rencontrée pour la première fois pour discuter du personnage, je n’avais pas encore tout le scénario. Nous avons commencé à répéter tout en continuant à parler du personnage. Ces discussions ont fait évoluer le scénario. Sa vision de mère célibataire m’a très certainement beaucoup aidé. Et elle a répété pendant neuf mois pour ce rôle, mettant tout le reste de côté. On n’a pas pu la payer suffisamment compte tenu du travail effectué, mais elle avait vraiment envie de faire ce film et elle l’a porté sur ses épaules.

Adapté de l’anglais vers le français par Romain Brunet. L’article original est à retrouver sur le site anglophone de France 24.

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