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Sortie du glyphosate: pourquoi l’année prochaine sera décisive

Le glyphosate n’en finit pas de diviser les chercheurs. Depuis la semaine dernière, la bataille des experts a été relancée par deux nouvelles études indépendantes. Le 30 juin, l’Inserm a rendu les conclusions de son étude, « Pesticides et effets sur la santé« , qui établit une « présomption forte d’un lien entre l’exposition aux pesticides et six pathologies », dont la maladie de Parkinson et le cancer de la prostate. La deuxième, publiée le 2 juillet par deux chercheurs indépendants sur le site de l’ONG américaine Sum of Us, remet en cause les travaux de recherche utilisés par les industriels du glyphosate pour convaincre les autorités européennes de l’absence de risque sanitaire. L’UE doit, en effet, se prononcer avant le 15 décembre 2022 sur le renouvellement de l’autorisation des produits à base de glyphosate. Le député du Rhône Jean-Luc Fugit (LREM) a été rapporteur d’une mission d’information de suivi sur la stratégie de sortie du glyphosate en France. Pour lui, le temps de la réflexion scientifique ne peut pas être le même que celui du débat politique, mais les autorités ont le devoir d’anticiper les risques. 

Challenges: Les dernières études pourraient-elles remettre en cause l’autorisation du glyphosate au niveau européen l’année prochaine?

Jean-Luc Fugit: A ce stade, je m’interroge.

taille des experts a été relancée par deux nouvelles études indépendantes. Le 30 juin, l’Inserm a rendu les conclusions de son étude, « Pesticides et effets sur la santé« , qui établit une « présomption forte d’un lien entre l’exposition aux pesticides et six pathologies », dont la maladie de Parkinson et le cancer de la prostate. La deuxième, publiée le 2 juillet par deux chercheurs indépendants sur le site de l’ONG américaine Sum of Us, remet en cause les travaux de recherche utilisés par les industriels du glyphosate pour convaincre les autorités européennes de l’absence de risque sanitaire. L’UE doit, en effet, se prononcer avant le 15 décembre 2022 sur le renouvellement de l’autorisation des produits à base de glyphosate. Le député du Rhône Jean-Luc Fugit (LREM) a été rapporteur d’une mission d’information de suivi sur la stratégie de sortie du glyphosate en France. Pour lui, le temps de la réflexion scientifique ne peut pas être le même que celui du débat politique, mais les autorités ont le devoir d’anticiper les risques. 

Challenges: Les dernières études pourraient-elles remettre en cause l’autorisation du glyphosate au niveau européen l’année prochaine?

Jean-Luc Fugit: A ce stade, je m’interroge. La science a besoin de temps pour avancer. Pour le moment, je m’en tiens à ce qui a été acté, à savoir que l’Autorité européenne de la Sécurité des Aliments (Efsa) devra rendre l’année prochaine un rapport fondé sur l’expertise apportée par quatre Etats membres, dont la France, pour savoir si le glyphosate peut être considéré comme toxique pour l’Homme. Il est important d’insister sur le fait que seule la molécule -et non les risques associés à son utilisation- est évaluée par ces agences de santé. L’étude de l’Inserm semble dire qu’il pourrait exister un risque cancérigène, mais il faudra attendre l’année prochaine, mi-2022, pour que l’Efsa publie ses recommandations définitives. En tout cas, il est trop tôt pour dire si ces études auront un impact sur la décision qui sera prise par le Conseil européen. 

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Le gouvernement français, lui, n’a pas attendu ces conclusions pour réduire l’utilisation du glyphosate. A-t-il fait le bon choix? 

La stratégie choisie par la France est responsable et sûrement l’une des meilleures en Europe. Du moment qu’il existe un doute, il faut anticiper l’avenir et réduire dès à présent notre consommation de produits phytosanitaires. Du moins, quand c’est possible et que cela n’entraîne pas de coûts excessifs. Car le débat sur le glyphosate ne doit pas se faire sur le dos des agriculteurs. Fin 2020, de nouvelles interdictions d’usage ont déjà été mises en œuvre par l’agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) pour retirer du marché certains produits à base de glyphosate. Mais seuls les produits auxquels il existe des alternatives, comme le maintien de l’herbe entre les rangs ou le désherbage mécanique, ont été retirés du marché. On ne gagnera pas contre les agriculteurs, il faut pouvoir avancer avec eux, en les écoutant. C’est pour cela, d‘ailleurs, que nous avons voté dans la loi de finances pour 2021 un crédit d’impôt de 2.500 euros pour les producteurs qui choisiront de renoncer au glyphosate. Car la décision doit venir d’eux-mêmes et l’Etat se doit de les accompagner dès maintenant. 

« Attention à la distorsion de concurrence »

La France a-t-elle des alliés en Europe pour réduire la consommation de pesticides? 

Notre pays représente 17% de la surface agricole utile de l’Union européenne. Il est donc normal que nous soyons à la hauteur de l’enjeu. Il n’y a qu’un seul pays plus offensif que nous, c’est le Luxembourg. Le Grand-Duché a décidé d’interdire totalement l’usage du glyphosate sur son sol. L’Autriche n’a pas confirmé ses ambitions, même s’il l’a officiellement interdit au Parlement en 2020. J’attends toujours de savoir ce que l’Allemagne fera, car Angela Merkel a pris un engagement en disant que son pays sortirait du glyphosate à la fin de l’année 2023. Mais à la différence de nous, les Allemands ont encore du chemin à faire. Le principe de réduction des pesticides vient seulement d’être approuvé par le Parlement, fin juin, et on peut encore trouver chez nos voisins européens des produits de jardinage grand public, comme le Roundup, en grandes surfaces. 

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Comment accélérer encore la sortie du glyphosate? 

L’année prochaine sera décisive, car la France assurera la présidence du Conseil européen. Si nous sommes capables d’entraîner d’autres pays et d’aller vers moins de pesticides, il faut le faire. Car nos agriculteurs pourraient subir les conséquences d’une distorsion de concurrence entre les pays qui continueront d’utiliser la molécule et ceux qui mettent en place des interdictions partielles, comme la France, ce que nous devons empêcher à tout prix. Car chaque pays reste maître des produits qu’il met sur le marché. Les agences européennes ne font qu’encadrer les substances actives des molécules, pas leur usage. Mais n’allons pas trop vite. A ce stade, disons qu’il nous faut rester en phase de veille attentive. Et attendre les futures consultations publiques menées par l’Efsa, qui se tiendront à la rentrée.

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