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En Éthiopie, les forces du Tigré poursuivent leur progression face à l’armée fédérale

Malgré l’annonce la veille d’un « cessez-le-feu unilatéral » par le gouvernement éthiopien après la perte de la principale ville tigréenne, les rebelles ont poursuivi mardi leur progression. Les autorités dissidentes de la région du Tigré ont assuré que leur lutte allait « s’intensifier » jusqu’à ce que tous les « ennemis » quittent la région.

Les forces des autorités dissidentes du Tigré ont gagné du terrain mardi 29 juin, au lendemain de la prise de la capitale régionale Mekele, appelant à chasser les « ennemis » de cette région du nord de l’Éthiopie en guerre depuis bientôt huit mois.

Les rebelles ont poursuivi leur progression, malgré l’annonce lundi soir d’un « cessez-le-feu unilatéral » par le gouvernement éthiopien, après la perte de la principale ville tigréenne, un tournant majeur du conflit.

Mekele était sous le contrôle de l’armée fédérale depuis le 28 novembre, trois semaines après le lancement par le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed, Prix Nobel de la paix 2019, d’une offensive pour renverser les autorités issues du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF).

Malgré la victoire proclamée après la chute de Mekele, les combats n’ont jamais cessé entre les forces pro-TPLF, qui se font appeler Forces de défense du Tigré (TDF), et l’armée fédérale éthiopienne, épaulée par des troupes des autorités régionales voisines de l’Amhara et par des soldats venus d’Érythrée, pays frontalier du Tigré.

Dans un communiqué publié dans la nuit de lundi à mardi, l’ancien gouvernement régional a appelé « notre peuple et notre armée à intensifier leur lutte jusqu’à ce que nos ennemis quittent complètement le Tigré ».

Les télécommunications sont coupées au Tigré, rendant difficile la vérification d’informations concernant les mouvements de troupes. Mais selon un responsable des Nations unies et une note d’évaluation de sécurité consultée par l’AFP, les TDF ont notamment pénétré dans la ville de Shire, au nord-ouest de Mekele.

Comme la veille à Mekele, l’arrivée des TDF a été célébrée par les habitants de Shire, désertée par les soldats éthiopiens et érythréens et par les fonctionnaires de l’administration locale installée par Addis Abeba.

« La population est descendue dans la rue en masse. D’immenses foules se massent le long des routes principales », peut-on lire dans la note de sécurité onusienne.

Renversement de situation

Le centre de réflexion International Crisis Group (ICG) estime que les TDF contrôlent « désormais la majeure partie de la région, y compris les grandes villes ».

Mardi soir, un porte-parole des forces rebelles, Getachew Reda, est allé jusqu’à menacer de « marcher » sur les capitales respectives de l’Érythrée et de l’Éthiopie.

« Nous ferons tout ce qu’il faut pour protéger le Tigré. S’il faut marcher sur Asmara pour protéger le Tigré, nous le ferons. S’il faut marcher sur Addis pour protéger le Tigré, nous le ferons. Rien n’est exclu », a-t-il déclaré à l’AFP, qualifiant le cessez-le-feu de « blague ».

En l’espace d’une dizaine de jours, les rebelles pro-TPLF ont inversé de manière spectaculaire le rapport de forces sur le terrain.

Bien qu’ils n’aient contrôlé aucune grande ville pendant des mois, leurs dirigeants avaient affirmé à plusieurs reprises se regrouper dans des zones rurales reculées. Ils ont lancé leur offensive le 18 avril, à trois jours des élections nationales très attendues, qui se sont tenues dans une grande partie de l’Éthiopie.

Les TDF ont assuré leur progression « principalement grâce à un massif soutien populaire et à la capture d’armes et d’équipements ennemis », estime William Davison, analyste à l’ICG.

Famine et risque d’épidémies

Le conflit au Tigré a été marqué par de nombreuses exactions envers les civils (massacres, viols, déplacements de population…) qui ont suscité l’indignation de la communauté internationale.

Les forces amhara y ont été accusées d’avoir annexé certaines zones, où un « nettoyage ethnique » a eu lieu selon le secrétaire d’État américain Antony Blinken.

Dans un communiqué, la branche Amhara du parti d’Abiy Ahmed a affirmé qu’elle s’opposerait à toute tentative de reprise de ces territoires.

La situation humanitaire est catastrophique au Tigré. Selon l’ONU, au moins 350 000 personnes se trouvent en situation de famine dans la région – ce que conteste le gouvernement éthiopien – et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a répété mardi son inquiétude quant au risque d’épidémies.

Le cessez-le feu annoncé par Addis Abeba a été salué mardi par la Chine, la France et les Émirats arabes unis, ainsi que par l’Union africaine (UA), qui a évoqué un « cessez-le-feu humanitaire ».

Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, avait dit lundi avoir « bon espoir qu’une cessation effective des hostilités aura lieu ».

Les États-Unis, l’Irlande et le Royaume-Uni ont demandé une réunion d’urgence publique du Conseil de sécurité de l’ONU, qui pourrait se tenir vendredi.

Les pays occidentaux n’ont jamais réussi à tenir une session publique sur le Tigré, les États africains, la Chine, la Russie ainsi que d’autres membres du Conseil jugeant que la crise était une affaire intérieure éthiopienne.

Avec AFP

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