L’Italie est assurée d’encaisser sous peu son premier chèque de l’Union européenne, qui a approuvé mardi son plan de relance financé par un emprunt commun inédit censé remettre à flot une économie terrassée par la pandémie de coronavirus.
« C’est une journée de fierté pour notre pays », a souligné le chef du gouvernement Mario Draghi depuis les mythiques studios de cinéma de Cinecittà à Rome, s’adressant à la presse aux côtés de la présidente de la Commission Ursula von der Leyen.
Le plan de relance est « l’opportunité pour une génération d’investir dans la force de l’Italie, de faire de l’Italie un moteur de croissance en Europe. Vous avez le plein soutien de la Commission européenne », a assuré Mme von der Leyen.
En tant que première bénéficiaire du plan de relance européen, avec 191,5 milliards d’euros de prêts et subventions, l’Italie n’a pas droit à l’erreur, d’autant que certains pays dits « frugaux » ont émis des doutes sur l’utilisation des fonds.
« Nous avons tous une responsabilité envers les citoyens européens qui paient des impôts pour financer notre plan national. Nous avons la responsabilité de bien faire », a reconnu M. Draghi, avant de s’engager à mettre en oeuvre des réformes « à une vitesse maximale ».
Pour apaiser la fronde des Etats réticents, menée par les Pays-Bas et l’Autriche, Bruxelles a subordonné l’octroi des 750 milliards d’euros prévus par le vaste projet de dette commune européenne à la réalisation de réformes.
– Pression sur Rome –
La pression sur Rome est énorme: « si le plan italien devait échouer, ça mettrait en cause toute la politique européenne de dette commune », a estimé Carlo Altomonte, professeur d’économie de l’université Bocconi, interrogé par l’AFP.
« Les pays frugaux diront +on vous l’avait bien dit, vous êtes incapables de bien dépenser la manne européenne+ ».
Ursula von der Leyen (gauche) et Mario Draghi (droite) lors d’une conférence presse à Cinecittà à Rome, le 22 juin 2021 (AFP – Alberto PIZZOLI)
Le premier versement du méga-plan de relance pourrait arriver dès juillet en Italie, soit près de 25 milliards d’euros.
Si Rome s’est montré dans le passé peu efficace dans la gestion de fonds européens, l’arrivée aux commandes du pays de Mario Draghi a changé la donne.
Il a nommé une trentaine de commissaires dotés de pouvoirs spéciaux pour ressusciter 57 projets d’infrastructures, enlisés dans les méandres de la légendaire bureaucratie italienne, et pris une série de décrets pour simplifier et accélérer les procédures.
Mario Draghi mise sur un ambitieux plan d’investissements d’au total 222,1 milliards d’euros sur six ans, axé sur la numérisation, la transition écologique et les infrastructures.
« Ce sera un travail très difficile, mais a priori toutes les étapes des réformes seront franchies avant la fin du mandat de Mario Draghi, qui restera en selle jusqu’à la fin de son mandat en 2023 », prévoit M. Altomonte.
L’entrée dans l’arène politique de l’ancien président de la Banque centrale européenne, réputé pour avoir sauvé la zone euro en pleine crise de la dette, a redistribué les cartes en Europe.
– « Grande crédibilité » –
« Mario Draghi est de fait devenu le nouveau dirigeant de l’Europe », avec une Angela Merkel sur le départ et un Emmanuel Macron confronté à des échéances électorales, assure Carlo Altomonte.
Mario Draghi lors d’une conférence de presse avec Ursula von der Leyen à Rome, le 22 juin 2021 (AFP – Alberto PIZZOLI)
« Mario Draghi jouit d’une grande crédibilité dans toute l’Europe, même auprès des +faucons+, et il a donc plus de marges de négociation que les autres », estime aussi Lucia Tajoli, professeure de politique économique à l’école Polytechnique de Milan.
Mais « il faudra absolument bien dépenser cet argent pour soutenir une reprise rapide en Italie et dans l’ensemble de l’Union européenne », déclare-t-elle à l’AFP.
L’économie italienne donne des signes d’embellie, avec une croissance de près de 5% attendue cette année grâce aux mesures de relance et aux investissements.
Bruxelles épingle toutefois régulièrement les « déséquilibres macroéconomiques excessifs » de l’Italie, en particulier « le niveau élevé de la dette » et « l’atonie persistante de la productivité ».
Rome ne pourra pas éternellement mettre son économie sous perfusion, prévient aussi le gouverneur de la Banque d’Italie, Ignazio Visco. Selon lui, « un avenir construit sur des aides et des subventions publiques est impensable ».
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