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A la frontière arménienne, le face à face des soldats avec les Azerbaïdjanais

Par Faustine Vincent

Publié aujourd’hui à 01h22, mis à jour à 01h31

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ReportageDes centaines de militaires de Bakou stationnent depuis le 12 mai sur le territoire arménien, à trois kilomètres de la frontière, selon Erevan, et refusent de partir.

A cette altitude, le vent souffle violemment sur les positions militaires arméniennes, creusées au milieu des pâturages. Près d’un abri, une grande croix chrétienne a été dessinée dans l’herbe avec des pierres. Le haut gradé montre les montagnes du doigt : « Vous voyez, là-bas, la ligne de crête ? La frontière avec l’Azerbaïdjan est là, explique le colonel adjoint Hayk Petrossian. Tout ce que l’on voit devant nous est sur notre territoire. Mais l’ennemi est entré à un kilomètre à l’intérieur. Maintenant on se retrouve face à face. » Il faut plisser les yeux pour les distinguer, mais les soldats azerbaïdjanais sont bien là, sur ce haut plateau de la région de Guegharkounik, en Arménie.

Le colonel adjoint Hayk Petrossian s’adresse à la presse étrangère, à la frontière, près du village de Sotk, en Arménie, le 18 juin 2021. ERIC GRIGORIAN POUR « LE MONDE »

Voilà plus d’un mois qu’ils stationnent ici. Le 12 mai, des centaines d’entre eux sont entrés sur le territoire arménien, entre 1 et 3 kilomètres à l’intérieur des frontières, selon Erevan. Aucune résistance ne leur a été opposée : ils se sont simplement déplacés et ont planté leur drapeau en différents endroits, dans le Guegharkounik et le Siounik, en affirmant qu’il s’agissait de leur territoire. « Le problème, c’est que la frontière n’était pas défendue en hiver », explique Arayik Haroutiounian, commandant du corps d’armée de Guegharkounik. Cette avancée a semé la panique en Arménie, sept mois après la défaite écrasante du pays face à l’Azerbaïdjan dans la guerre dans le Haut-Karabakh, à l’automne 2020, et alors que le pays préparait les élections législatives du 20 juin.

Un militaire arménien sur un poste de contrôle à la frontière près du village de Sotk, en Arménie, le 18 juin 2021. ERIC GRIGORIAN POUR « LE MONDE »

Pour des raisons de sécurité, la zone est désormais interdite d’accès, mais le ministère de la défense a autorisé quelques médias, dont Le Monde, à s’y rendre le 18 juin, sous son contrôle. A 2 500 mètres d’altitude, la voiture traverse en cahotant des villages à demi désertés, des kolkhozes en ruine, contourne les troupeaux de vaches, passe devant des carcasses de voitures qu’un villageois a soigneusement alignées pour marquer les limites de son terrain, grimpe le long de la mine d’or de Sotk, et s’arrête devant des conteneurs camouflages tenus par deux hommes en armes.

Le drapeau de l’Azerbaïdjan visible depuis un poste de contrôle à la frontière près du village de Sotk, en Arménie, le 18 juin 2021. ERIC GRIGORIAN POUR « LE MONDE »

Sur la colline, les drapeaux arménien et azerbaïdjanais flottent quasiment côte à côte. « Ici, chacun est sur son territoire, mais là, à gauche, ils ont traversé une ligne qu’ils ne devaient pas franchir, explique Hayk Petrossian. Ils arrivent parfois à 50 ou 60, et sont armés. »

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Multiplication des incidents

Du temps de l’URSS, la frontière était purement administrative, et personne n’y prêtait attention. Mais, depuis que l’Azerbaïdjan a reconquis les zones tampons autour de l’enclave du Haut-Karabakh, les deux anciennes républiques soviétiques ont plusieurs centaines de kilomètres d’une frontière commune, qui n’est pas délimitée. Erevan accuse Bakou de la tracer de manière unilatérale, alors que le processus exige la création d’une commission spéciale et des négociations entre les deux pays, qui n’ont jamais eu de relations diplomatiques.

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