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Privée de ses clubs, Ibiza cherche à se réinventer

Par Sandrine Morel

Publié aujourd’hui à 05h56, mis à jour à 05h57

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ReportageL’île des Baléares, qui souffre sévèrement de la crise économique, voit dans la pandémie de Covid-19 l’occasion d’accélérer le changement de son modèle touristique, hautement dépendant du monde de la nuit.

Dans les « beach clubs » de la plage des Salines d’Ibiza, quelques dizaines de touristes savourent le coucher du soleil en sirotant des cocktails avant que sonne l’heure du couvre-feu, à minuit. Quelques kilomètres plus loin, la nuit tombe dans un morne silence sur la discothèque Amnesia, en ce dernier week-end du mois de mai.

Hormis quelques chats qui déambulent devant l’entrée aux murs délavés de l’un des plus célèbres clubs de cette île des Baléares, il n’y a pas âme qui vive sur le parking abandonné. En temps normal, à cette date, ce dernier devrait être bondé, revêtu d’une pelouse artificielle et décoré de plantes vertes luxuriantes pour sa traditionnelle « fête d’ouverture ». Là, seul y stationne un bus à impériale aux couleurs du club, et il n’est guère prêt à redémarrer.

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Après dix-huit mois de fermeture pour cause de pandémie de Covid-19, Pacha, Hï, Privilege, DC10 et d’autres immenses discothèques de l’archipel espagnol, paradis des clubbeurs du monde entier, attendent la tenue de soirées-tests et un éventuel feu vert du gouvernement régional des Baléares dans l’espoir de rouvrir, au mieux, à la fin du mois d’août. Pour l’heure, seul l’Amnesia, club de 5 000 places, s’est avancé à fixer une date de retrouvailles : le 23 octobre… pour sa « closing party ».

A l’extérieur de la discothèque Amnesia, l’une des références de la vie nocturne d’Ibiza, le 27 mai 2021. CESAR DEZFULI POUR «LE MONDE»

En attendant ces hypothétiques réouvertures, l’île verdoyante aux criques idylliques, aux eaux cristallines et aux villages blancs, paradis hippie des années 1970 avant de devenir le haut lieu des clubbeurs, redécouvre un calme et une tranquillité oubliés depuis longtemps. L’île, qui souffre sévèrement de la crise économique, voit dans la pandémie l’occasion d’accélérer le changement de son modèle touristique, hautement dépendant du monde de la nuit – ce sur quoi elle travaille déjà depuis plusieurs années.

« Préserver notre environnement »

« La pandémie a ouvert les yeux de tous et changé notre manière de vivre, estime Vicente Mari, président du Conseil insulaire d’Ibiza. Ibiza endure une très forte pression durant l’été, dont elle se remet le reste de l’année. Notre objectif est de désaisonnaliser l’activité économique pour que l’île vive toute l’année – et ce de manière durable –, d’attirer les travailleurs nomades numériques, de miser sur les énergies propres ou d’encourager l’agriculture, la pêche et l’élevage, car seulement 3 % des aliments que nous consommons sont produits ici… »

Les restaurants et les bars en exterieur commencent à ouvrir. Comme ici dans le port de la ville. CESAR DEZFULI POUR «LE MONDE»

Chez les élus municipaux, la réflexion progresse. Fin avril, Sant Joan de Labritja, dans le nord de l’île, a ainsi fait ratifier une norme interdisant toute nouvelle discothèque ou tout nouveau beach club sur la commune. Tous les groupes représentés à la mairie, de droite comme de gauche, ont voté pour, et les médias locaux ont salué la mesure, certains appelant à ce qu’elle se généralise. « Nous voulons conserver l’image de l’Ibiza traditionnelle et préserver notre environnement en attirant un tourisme plus familial, en contact avec la nature », explique le maire conservateur, Antoni Mari, qui n’en a pas moins soutenu la construction d’un grand hôtel de luxe de la chaîne Six Senses sur la pointe rocheuse de la baie de Cala Xarraca.

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