Il aura fallu plus de trois mois aux partis indépendantistes catalans pour se mettre d’accord, malgré la majorité absolue atteinte aux élections régionales de mi-février. Après de rudes négociations, un temps rompues, le candidat de la Gauche républicaine de Catalogne (ERC), Pere Aragonès, a finalement été investi, vendredi 21 mai, à Barcelone, président de la Généralité, le gouvernement de Catalogne.
Cet économiste de 38 ans a obtenu 74 voix, celles des députés des trois partis indépendantistes, et 61 contre, soit le reste du Parlement catalan. Lors de son discours d’investiture, il a assuré vouloir « rendre possible l’aboutissement de l’indépendance, rendre inévitable l’amnistie [des leaders indépendantistes emprisonnés] et exercer le droit à l’autodétermination ». M. Aragonès a surtout promis une « confrontation civique et pacifique » avec « l’Etat espagnol ». Car derrière ces formules prononcées d’un ton monocorde, c’est un indépendantiste modéré, opposé à l’approche « unilatérale » des séparatistes radicaux, et disposé à négocier avec le gouvernement espagnol, qui a pris les rênes de la région rebelle.
Son élection marque une forme de rupture au sein du camp indépendantiste. Depuis 2012, la droite nationaliste catalane et ses divers avatars avaient fait en sorte de garder la direction de la région, aux dépend de son allié ERC. Ce parti de gauche n’avait pas repris les rênes du gouvernement catalan à Barcelone depuis la guerre civile et l’assassinat de Lluis Companys, fusillé par les franquistes en 1940. L’un de ses fondateurs, Josep Tarradellas, avait certes présidé la Généralité de 1954 à 1977, mais depuis son exil en France, puis brièvement à son retour en Catalogne jusqu’en 1980.
Multiplication des concessions
Les débats d’investiture, vendredi, n’en ont pas moins été houleux. Indépendance et amnistie « ne se produiront pas et vous le savez : tout le monde le sait », n’a pas manqué d’asséner le socialiste Salvador Illa, arrivé en tête des dernières élections mais sans majorité pour gouverner. Sur les réseaux sociaux, les séparatistes radicaux ont crié à la « trahison ». Junts per Catalunya (Ensemble pour la Catalogne), parti séparatiste de droite avec lequel ERC a signé un accord de coalition, avait en effet promis que si les trois partis indépendantistes dépassaient les 50 % des voix, le gouvernement catalan proclamerait de nouveau l’indépendance – ces formations ont obtenu 52 % des suffrages le 14 février.
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