Des files de voitures s’étirent devant les pompes à essence de Cali. La troisième ville de Colombie connaît des difficultés d’approvisionnement en combustible depuis plusieurs jours, tandis que, dispersés en petits groupes, les manifestants bloquent les principales voies d’accès. La mobilisation qui dure depuis treize jours ne donne pas de signe d’essoufflement. « Au lieu d’écouter le peuple, le gouvernement lui tire dessus, s’indigne Daniel, 23 ans. Alors le peuple reste là. » Dimanche 9 mai, les autorités ont annoncé un renforcement de la présence militaire et la fermeture des « frontières » du département du Valle del Cauca, dont Cali est le chef-lieu, jusqu’au 15 mai.
A Bogota, le Comité national de grève et le gouvernement se sont assis, lundi, à la table des négociations pour la première fois depuis le début du mouvement social. Ils se sont levés, quatre heures plus tard, sans avancée aucune. A la sortie de la réunion, le Comité – qui réunit syndicats, organisations sociales et leaders étudiants – a appelé les Colombiens à une nouvelle journée de mobilisation le 12 mai. Le Congrès devrait, ce jour-là, siéger à Cali.
Cette ville de 2,2 millions d’habitants est devenue l’épicentre du mouvement qui, depuis le 28 avril, affecte à différents degrés l’ensemble du pays. La répression policière y a été particulièrement brutale les premiers jours. Les manifestants qui, à Cali comme dans le reste du pays, étaient initialement descendus dans la rue pour protester contre un projet de réforme fiscale (et qui ont obtenu son retrait) exigent maintenant la démilitarisation du pays, une réforme de la police et l’application de l’accord de paix signé par le précédent gouvernement avec la guérilla des FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie), entre autres revendications.
Visite express du chef de l’Etat
Dimanche, dans le sud de la ville, de violents incidents ont opposé les Indiens venus soutenir la mobilisation urbaine à un commando de civils armés. Une vingtaine d’indigènes ont été blessés, huit seraient toujours hospitalisés. Alors que le gouvernement et les élites locales accusent les manifestants de « séquestrer Cali », les images de ces hommes blancs vêtus de blanc qui circulent en armes sans être inquiétés par l’armée alimentent les craintes d’un dérapage violent.
Les autorités locales et la population de Cali – pro et anti-mobilisation – réclamaient la présence du chef de l’Etat depuis plusieurs jours. Lundi matin avant le lever du jour, Ivan Duque y a finalement effectué un rapide déplacement. Il y est resté moins de trois heures. Ce voyage express a exacerbé les esprits, plus qu’il ne les a calmés. « Si le président vient en cachette, c’est parce qu’il ne gouverne plus », affirme Daniel.
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