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« Agent orange » : la justice déboute Tran To Nga

Tran To Nga, journaliste franco-vietnamienne, interviewée chez elle à Evry par l’agence Associated Press, le 10 mai 2021. Tran To Nga, journaliste franco-vietnamienne, interviewée chez elle à Evry par l’agence Associated Press, le 10 mai 2021.

Dans le procès hors norme intenté par Tran To Nga – une Franco-Vietnamienne de 79 ans qui a connu les affres de la guerre dans son pays natal et souffre de plusieurs pathologies – contre quatorze multinationales de l’agrochimie, le tribunal judiciaire d’Evry (Essone) a décidé, lundi 10 mai, qu’il n’était pas compétent. Non pas que Dow, Monsanto (BASF), Hercules, Uniroyal et les autres firmes mises en cause nient avoir fourni à l’armée américaine le fameux « agent orange » dont 80 millions de litres ont été épandus au-dessus des forêts vietnamiennes entre 1961 et 1971.

Mais le tribunal s’en est tenu à la défense des quatorze sociétés productrices de ce défoliant chimique qui a causé des millions de victimes, empoisonné l’environnement, et qui continue à faire naître des enfants gravement handicapés plusieurs générations plus tard. Ces entreprises arguent qu’elles avaient agi « sur ordre et pour le compte de l’Etat américain, dans l’accomplissement d’un acte de souveraineté ». Dans ces conditions, bien qu’elles soient des sociétés de statut privé, elles ne peuvent être jugées car elles bénéficient du même droit que l’Etat souverain pour lequel elles ont agi.

William Bourdon, Amélie Lefèbvre et Bertrand Repolt, qui défendent bénévolement depuis sept ans Tran To Nga, ont aussitôt rendu publique l’intention de cette dernière de faire appel. Ils estiment que le tribunal d’Evry applique un principe obsolète, « en contradiction avec les principes modernes du droit international » et national. Eux espéraient obtenir un dédommagement, en attente d’une décision finale, et une expertise médicale qui aurait permis de déterminer les préjudices subis par leur cliente dans les années 1960. Elle travaillait alors comme journaliste parmi les combattants du Front de libération du Sud Vietnam.

Toxicité connue dès les années 1950

Grâce à un travail obstiné, ce trio a rassemblé des témoignages lors de voyages aux Etats-Unis, au Vietnam, ainsi que des documents révélateurs sur ces firmes, toutes américaines, dont certaines ont changé de nom à l’issue de fusions et acquisitions ultérieures. A l’époque, elles avaient répondu à un appel d’offres, pas à une réquisition de la part du gouvernement, plaident ces avocats. Et elles disposaient d’une réelle latitude dans le mode de production du défoliant. Car au moment où il était massivement déversé par voie aérienne en Asie du Sud-Est, une version grand public à base des deux mêmes molécules herbicides était fabriquée selon un autre procédé qui, lui, ne générait pas la dioxine de type Seveso (TCDD).

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