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A Jérusalem-Est, des Palestiniens menacés d’expulsion

Des colons installés au numéro 10 de la rue Othman Ben Affan, depuis l’expulsion en 2009 de son occupante, Mariam Ghawi, à Sheikh Jarrah, à Jérusalem, le 6 mai 2021. Des colons installés au numéro 10 de la rue Othman Ben Affan, depuis l’expulsion en 2009 de son occupante, Mariam Ghawi, à Sheikh Jarrah, à Jérusalem, le 6 mai 2021.

Il ne manque qu’un bidon d’essence et des allumettes à la table qu’a dressée Itamar Ben-Gvir, jeudi 6 mai, sur un trottoir de Sheikh Jarrah, un quartier de Jérusalem-Est. En cette fin de mois de ramadan, le député suprémaciste juif, fraîchement élu au Parlement israélien, défenseur des colons les plus violents du pays, est venu défier les habitants palestiniens à l’heure de la rupture du jeûne, sous haute protection policière.

Ça n’a pas manqué : des chaises ont volé. Des voitures ont été incendiées. La police a chargé jusque tard dans la nuit dans ces ruelles, qui ont pourtant tout, en temps normal, d’un havre enchanteur. C’est une vallée arborée, qui s’enfonce entre deux hauteurs de la partie palestinienne de Jérusalem. Un lacis de maisonnettes et de jardins où les arbres fruitiers font de l’ombre, piqués de pins et de hauts palmiers. Depuis des décennies, une vingtaine de ces maisons font l’objet d’une bataille en justice entre leurs habitants et le mouvement des colons, qui suscite des manifestations locales ces jours-ci, alors que la Cour suprême israélienne doit rendre, lundi, un avis fort attendu.

Jeudi, quatre familles palestiniennes ont refusé, auprès du tribunal de district, un accord qui leur aurait permis de demeurer chez elles, à condition de reconnaître que leurs maisons appartiennent à une association de colons, Nahalat Shimon, et de payer un loyer symbolique. Lundi, la Cour suprême doit décider d’autoriser une procédure en appel, ou d’ordonner leur expulsion. Depuis 2008, dix familles ont déjà dû partir. Trois autres attendent qu’une date d’expulsion leur soit signifiée en août. En tout, 70 familles sont menacées.

« Injustice inscrite dans le système judiciaire »

« Alors, il s’est passé quoi au tribunal ? » Jeudi après-midi, sur la pente sud de la vallée, une voisine interpelle Abdel Fattah Skafi, 71 ans, depuis le soupirail de sa demeure. « On attend », maugrée-t-il. Le bâtiment que M. Skafi partage avec ses trois fils et leurs huit enfants est l’un de ceux sur lesquels la justice doit statuer. Ce vieil homme distingué, au long corps sec, remonte en bras de chemise une minuscule ruelle, désignant une à une les maisons déjà saisies, où sont installés des colons qui encerclent la sienne.

Abdel Fattah Skafi, 71 ans,  devant l’entrée de sa maison entourée d’habitations de colons dans le quartier de Sheikh Jarrah, à Jérusalem, le 6 mai 2021. Il est dans l’attente de la décision de la Cour suprême, auprès de laquelle il a fait appel avec les autres familles palestiniennes de la rue Othman Ben Affan. Abdel Fattah Skafi, 71 ans,  devant l’entrée de sa maison entourée d’habitations de colons dans le quartier de Sheikh Jarrah, à Jérusalem, le 6 mai 2021. Il est dans l’attente de la décision de la Cour suprême, auprès de laquelle il a fait appel avec les autres familles palestiniennes de la rue Othman Ben Affan.

M. Skafi est né à Jérusalem. Durant la guerre de 1948, sa famille a été évacuée de la « colonie allemande », au sud, vidée par Israël de sa population arabe. En 1956, ils ont déchiré les papiers qui attestaient de leur statut de réfugiés, lorsque leur a été attribuée, comme à 28 autres familles, une maison à Sheikh Jarrah – 60 m2 terrassés dans les oliviers –, financée et construite par l’Office des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient et la monarchie jordanienne, alors souveraine à Jérusalem-Est et en Cisjordanie.

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