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Tensions dans les eaux de Jersey : les raisons de la colère des pêcheurs français

Des pêcheurs français tentent de bloquer l’entrée du port de Saint-Hélier à Jersey, le 6 mai. Des pêcheurs français tentent de bloquer l’entrée du port de Saint-Hélier à Jersey, le 6 mai.

Leurs banderoles « en colère » toujours bien visibles sur leurs flancs, ils ont quand même levé l’ancre en début d’après-midi. La cinquantaine de bateaux de pêche français, de Granville, Carteret (Manche) et Saint-Malo (Ille-et-Vilaine) qui avaient cinglé jeudi 6 mai avant l’aube en direction de Jersey, ont mis fin à leur action après avoir stationné plusieurs heures à l’entrée du port de Saint-Helier. Il s’agissait d’une démonstration de force destinée à protester contre les nouvelles conditions de pêche imposées par la principale île anglo-normande, dépendance de la couronne britannique, dans le cadre de « l’accord de commerce et de coopération » post-Brexit entre le Royaume-Uni et l’Union européenne (UE).

Envoyés sur zone par Londres aux premières heures du jour, deux patrouilleurs de la Royal Navy n’ont pas eu à intervenir, les Français ayant à peine tenté de bloquer le port – deux frégates de la gendarmerie nationale les avaient rejoints en matinée. Les pêcheurs ont pu rencontrer des membres du gouvernement de Jersey (qui dispose d’un exécutif autonome, même si sa politique étrangère est assurée par Londres).

Jugée « positive » par Jersey, la discussion « n’a pas du tout été satisfaisante » assure en revanche au Monde Dimitri Rogoff, président du Comité régional des pêches de Normandie, « les autorités de Jersey sont restées sur leurs positions en disant qu’elles respectent le traité [post-Brexit] et qu’elles sont dans leur bon droit ».

Exigences accrues

Pourquoi une telle poussée de fièvre cinq mois après le Brexit, sur un sujet qui a certes été ultrasensible durant toute la durée des négociations du divorce, mais pour lequel un accord avait été trouvé, in extremis, à la fin 2020 ? Les zones de pêche de l’île anglo-normande, distante d’à peine 22 km des côtes françaises, ont fait pendant des siècles l’objet de contentieux. « Au milieu des années 1990, déjà, il y avait beaucoup de tensions et d’accrochages dans la zone, et on a fini par aboutir au traité de la baie de Granville, en 2000 [entre Londres, Paris et les îles anglo-normandes]», se rappelle Sir Peter Ricketts, ex-ambassadeur du Royaume-Uni en France.

Ce traité a été remplacé par les dispositions concernant la pêche dans l’accord commercial post-Brexit. Elles prévoient une période de transition jusqu’à l’été 2026, date à laquelle les pêcheurs européens renonceront à 25 % des prises dans les eaux britanniques. Elles sont aussi censées préserver les anciens droits de pêche dans les eaux du Channel, mais les pêcheurs européens doivent y décrocher des licences, attribuées par les îles anglo-normandes. Parmi les conditions attachées à leur octroi : les pêcheurs doivent démontrer qu’ils pêchaient dans la zone considérée sur une période comprise entre 2012 et 2016.

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