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Iran : le journaliste Mohammad Mosaed, tête de Turc du régime, forcé à l’exil

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Par Ghazal Golshiri

Publié aujourd’hui à 00h52

Cet homme-là s’habille toujours en noir et marche à pas prudents, par crainte d’être suivi. Quand il parle, c’est à voix basse, sur le ton de la confidence. Mohammad Mosaed est jeune, 31 ans, mais il mesure le prix de la liberté : ce journaliste iranien exilé en Turquie sait que les agents de la République islamique ont fait de ce pays leur arrière-cour, n’hésitant pas à y mener des opérations d’enlèvement et d’assassinat d’opposants. D’où sa méfiance, ses lunettes de soleil, et cette volonté de passer le plus inaperçu possible.

Dans sa vie d’avant, Mohammad Mosaed était loin d’être discret. Son franc-parler et ses investigations sur la corruption faisaient de lui une figure du journalisme iranien. Mais le 17 janvier, au terme d’un épuisant combat judiciaire, il a préféré fuir.

Quelques jours plus tôt, sa peine de quatre ans et neuf mois de prison – assortie de deux ans d’interdiction d’exercer son métier et de la confiscation de ses appareils de communication – avait été confirmée en appel. Ses fautes ? Avoir donné une « image sombre » de la situation du pays et avoir « influencé les lecteurs qui n’ont pas des idées claires ». Une injustice absolue, d’après lui, et une procédure expéditive.

Le journaliste Mohammad Mosaed, à Ankara,  le 11 mars 2021.Le journaliste Mohammad Mosaed, à Ankara,  le 11 mars 2021.

Son histoire, telle qu’il la raconte au Monde à la table d’un café d’Ankara, commence dans une petite ville du nord de l’Iran, Sowme’eh Sara. C’est là qu’il grandit, avec son père, instituteur, et sa mère, femme au foyer. Dès l’âge de 17 ans, il publie dans divers magazines et journaux des chroniques sur la littérature. Avec une préférence marquée pour des romanciers à connotation politique comme Mario Vargas Llosa, Gabriel Garcia Marquez ou George Orwell.

« Est-ce que vous nous entendez ? »

En 2017, il s’installe à Téhéran, où il devient reporter au sein du quotidien réformateur Shargh. Chargé de traiter des sujets de société ou d’économie, il couvre des affaires politico-financières et s’intéresse aux revendications ouvrières.

Peu à peu, sa vision du pays évolue. « En étudiant les conditions de vie des ouvriers et en menant les enquêtes financières, je me suis rendu compte à quel point la corruption de la classe politique, aussi bien du côté des réformateurs que du côté des conservateurs, est profonde. Ces deux camps ont des intérêts communs. C’est un mythe de dire que les réformateurs se soucient davantage de la population. Ce que j’écrivais fâchait. » A l’époque, ces publications valent à son rédacteur en chef toutes sortes de pressions. De son côté, Mohammad Mosaed se sent frustré par le fait que la presse officielle – dont fait partie Shargh – ait très souvent l’interdiction de relayer des informations sur les vagues de protestation, la flambée des prix ou les arrestations de militants et d’étudiants. « Le mot d’ordre venant des autorités est : La situation est critique. Ne provoquez pas vos lecteurs », précise-t-il.

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