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Le Covid rapproche les Français de leurs marques préférées

ur par rapport à la précédente étude de 2017. « Bien au contraire, quand les gens souffrent, ils ont besoin de réassurance », rappelle le consultant en études marketing Philippe Guilbert. Mais des changements profonds sont à l’œuvre, comme l’illustre le taux d’empathie des groupes mutualistes, bien ancrés dans les territoires et proches de leurs clients. Axa et BNP Paribas séduisent moins.

L’acte d’achat est devenu identitaire. « Je consomme donc je suis », résume Rodolphe Bonnasse, PDG de l’agence CA Com. Le rapport de force des entreprises avec leurs clients s’est inversé. Pour conquérir le cœur des Français, les marques doivent être exemplaires face à des consommateurs à qui l’on ne peut plus rien cacher. Et, comme en amour seuls les actes comptent, cela passe par le maintien d’un lien commercial avec les clients quand les magasins ferment, le gel des tarifs pour les sociétaires dont les revenus chutent, ou encore la promotion du made in France pour consolider des filières. Decathlon, Macif, Lidl l’ont fait.

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Reste qu’en dans cette période troublée, ce sont surtout les marques alimentaires que chérissent les Français. En 2021, elles occupent les quatorze premières places d’un palmarès qui évalue 1.200 marques. Sur le podium Danone, Saint Michel et Bonne Maman régalent. Lu, Amora, Lindt, Carte d’or, Barilla, La Laitière ou encore Président complètent le banquet. Et, parmi les plus fortes progressions, les produits d’entretien cartonnent, tels Paic, Skip et St Marc, mais pour d’autres raisons. Reclus, les Français ont fait davantage la vaisselle, lavé à fond leur linge et briqué leurs intérieurs. Ils se sont mis au bricolage également, comme l’atteste le bond de Leroy Merlin dans le Top-3 des enseignes spécialisées.

Proche de chez moi ou de moi

Enfin, pour comprendre l’affection des Français envers certaines marques, ils ont été questionnés sur les valeurs qu’ils y associent. Sur l’engagement, la prépondérance des enseignes comme la chaîne Biocoop ou l’entreprise de commerce équitable Alter Eco ne surprend guère.

En revanche, le tandem gagnant formé pour l’utilité de leur offre par le moteur de recherche Google et le site de prise de rendez-vous médical Doctolib – et de vaccination! – détonne. Plus surprenant encore, le coude-à-coude entre Leclerc et Netflix sur la notion de proximité. Proche de chez moi ou de moi… la frontière est ténue mais c’est toujours de conquête et de séduction dont il s’agit.

1.200 FOIS « J’AIME » (OU PAS)

L’Observatoire Marque préférée des Français a basé son enquête sur un sondage réalisé en ligne par Kantar du 11 au 25 janvier 2021 auprès de 4.900 répondants. Parmi les 1.200 marques évaluées, celles ayant le plus de réponses « j’aime » sur un thème donné ou dans leur secteur obtiennent le score 100. L’utilisation à des fins publicitaires et de communication au sens large, des textes et tableaux issus de cet article est interdite.

Utilité

Utilité

Engagement

(Pascal SITTLER/REA)

Proximité

 

(Franck CRUSIAUX/REA)

Banque: Le bon sens près de soi

Chassés du Top-5, les acteurs historiques cèdent la place aux réseaux bien enracinés dans les territoires comme le Crédit agricole, La Banque postale mais aussi la Caisse d’épargne alors que le trublion numérique, Boursorama, figure pour la première fois dans ce petit cercle. Forte d’un portefeuille de 2 millions de clients, la banque en ligne déloge la Société générale – sa maison mère – qui occupait ce rang dans l’étude précédente.

« Le Covid-19 a sans doute accéléré la digitalisation et la bipolarisation du secteur, explique Philippe Guilbert, consultant en études marketing. Certains clients sont sensibles aux valeurs mutualistes et ont besoin d’une agence de proximité, d’autres recherchent surtout des services en ligne et des tarifs réduits. » De même, le Crédit Mutuel, et ses 2.100 caisses locales, se démarque des grands argentiers qu’incarnent BNP Paribas et la Société générale. Et si La Banque postale perd sa couronne de leader, qu’elle portait depuis 2010, c’est probablement pour avoir moins distribué de prêts garantis par l’Etat pendant la pandémie que ses rivales. Un accompagnement des petites entreprises qui a sûrement réchauffé l’image du Crédit agricole.

(Stephane LEITENBERGER/REA)

Assurance: Une solidarité… payante!

La crise qui frappe le pays depuis un an a chamboulé la cote d’amour des Français envers leurs compagnies d’assurances. Au plus haut du podium en 2017, Axa paie son manque de solidarité avec les restaurateurs obligés de fermer depuis de longs mois. Certains d’entre eux n’ont pas hésité à attaquer devant les tribunaux pour faire valoir leurs droits lors de procès très médiatiques. Les Français n’ont pas apprécié. A contrario, les groupes mutualistes ont mis en avant leurs valeurs de solidarité comme la MAAF qui a aidé, conformément à ses garanties, des milliers d’entreprises dont les locaux ont fait l’objet d’une impossibilité d’accès. De son côté, la Macif a mobilisé 20 millions d’euros pour aider les plus démunis, gelé les tarifs des contrats multirisques professionnels et exonéré de cotisation les cafetiers et hôteliers pendant quatre mois. « Leur modèle sans actionnaire, où chacun a le sentiment de faire partie d’un tout, plaît aux Français », constate Rodolphe Bonnasse, PDG de l’agence CA Com. Une posture qui profite aussi à la MAIF: la mutuelle a rendu à ses sociétaires 100 millions d’euros d’économies dues au confinement. Elle pointe cette année devant la porte du Top-5.

(Laurent CERINO/REA)

Automobile: Toutes griffes sorties

Peugeot confirme sa place de leader acquise en 2017 grâce au succès de ses modèles, dont la 208, élue voiture de l’année en 2020. « C’est le fruit d’une stratégie de marque iconique qui fait preuve de créativité commerciale », estime Rodolphe Bonnasse. A l’instar de son nouveau site de vente qui offre tous les services d’une concession : configuration, financement et reprise de l’ancien véhicule. La plus ancienne marque automobile du monde encore en activité est bien en phase avec son temps comme en témoigne la volonté de sa nouvelle patronne, Linda Jackson, de vendre 80 % de véhicules électrifiés dès cette année.

Au sein du consortium Stellantis, Peugeot devra encore affirmer son identité parmi 13 autres marques, dont Fiat qui n’apparaît même pas dans le Top-10. A l’assaut des deux champions français, les marques allemandes semblent ne pas avoir souffert du scandale du « dieselgate ». « Elles jouissent d’une forte confiance des consommateurs, en particulier pour Mercedes, numéro un sur ce critère », indique Philippe Guilbert. Et si Tesla n’apparaît pas encore, la volonté de démocratiser ses modèles électriques devrait finir par séduire les Français.

(Gilles ROLLE/REA)

Distribution spécialisée: Les Gaulois résistent

Dans ce secteur très concurrentiel, les marques de l’ancien monde font plus que de la résistance. Deux enseignes de la famille Mulliez, Decathlon et Leroy Merlin, prennent Amazon en tenaille. Comme la Fnac et Ikea, ces distributeurs avaient déjà amorcé leur transformation digitale avant que le coronavirus ne s’abatte sur le monde. Ainsi, malgré la fermeture de leurs magasins lors des confinements, elles ont fait preuve d’agilité, installant des drives sur leur parking, par exemple, pour livrer les commandes passées sur Internet. Les consommateurs ont apprécié. Certes, Leroy Merlin et la Fnac ont profité du cantonnement des salariés à leur domicile. « Cela en a incité beaucoup à lancer des travaux d’embellissement ou de rénovation chez eux », sourit Rodolphe Bonnasse, PDG de l’agence CA Com. Et aussi à investir dans une télé neuve ou un nouvel ordinateur. Quant à Decathlon, déjà premier en 2017, il défend son rang grâce à une forte proximité avec ses clients. C’est la marque qui fabrique des marques, avec chacune un territoire bien précis. Affinité commerciale et accessibilité des prix constituent le cocktail magique de ce géant mondial des articles de sport.

(Fred MARVAUX/REA)

Distribution alimentaire: La carte des territoires

En 2012, le gérant de Lidl avait annoncé la couleur: « Sortir du hard discount pour devenir la marque en vogue et le supermarché des classes moyennes et aisées. » Ce plan stratégique, baptisé Pole position, consistait à faire entrer des marques nationales dans ses rayons, à vendre du pain chaud et des viennoiseries fraîches, à développer les fruits et légumes, sans oublier des foires aux vins devenues incontournables. Une décennie plus tard, le discounter allemand fait jeu égal avec Leclerc. Une percée remarquable aidée par l’ouverture de magasins et des campagnes de pub massives. « Lidl joue la carte des territoires avec une logique presque cocardière », s’amuse Rodolphe Bonnasse, PDG de l’agence CA Com. En progression, Intermarché profite de son maillage territorial serré quand les hypermarchés de Carrefour ont souffert des confinements.

Mais le groupe dirigé par Alexandre Bompard, qui a fait de la transition alimentaire son cheval de bataille, colle au peloton de tête, là où Auchan, inventeur du drive, décroche. Attention, car l’enseigne Grand Frais se rapproche du Top-5. « Elle est déjà numéro un sur la confiance », prévient le consultant Philippe Guilbert. Une valeur clé dans ce secteur.

(Franck CRUSIAUX/REA)

High-tech: Un absent de marque

Ce qui frappe, de prime abord, à la vue de ce Top-5 des marques technos, c’est l’absence d’Apple. La multinationale américaine, aux 274 milliards de dollars de chiffre d’affaires annuel, est même dans les limbes. « Elle n’est plus dans le Top-20 , indique Claire Doin, directrice de Marque préférée des Français. Par rapport à la précédente vague, son taux d’empathie s’effondre, avec un recul de 101 places (désormais en 401e position) parmi les 1.200 marques évaluées, en raison du nombre élevé de répondants qui affirment ne pas l’aimer. » Moins clivant, Samsung conforte sa place de leader. Et les déboires du patron et principal héritier de ce conglomérat sud-coréen, condamné en janvier à deux ans et demi de prison, ne semblent pas nuire à son image. Il faut dire que le premier fabricant mondial de smartphones en 2020 est présent un peu partout dans la maison: téléphones, écrans TV, réfrigérateurs, fours à micro-ondes, plaques à induction, lave-linge… « Globalement, le secteur high-tech ne progresse pas en termes d’empathie », révèle cependant Philippe Guilbert. Microsoft monte tout de même une marche grâce à sa suite bureautique Office, bien connue du grand public.

(ZUMA Press/ZUMA/REA)

Opérateurs téléphoniques: Veillée d’armes avant la 5G

Un temps détrôné par Free, et ses abonnements à petits prix, l’opérateur de télécommunications historique est remonté sur la première marche du podium depuis 2017. Orange dispose même de plusieurs encablures d’avance sur son poursuivant, qui est en quête de nouveaux moteurs de croissance. La 5G en est un à l’évidence. « Free, dans sa posture d’intervenant alternatif, s’installe durablement », constate cependant Rodolphe Bonnasse. Et de rappeler l’opération lancée avec le concepteur d’enceinte haut de gamme Devialet pour sa Freebox Delta. La crise du Covid-19 a toutefois conduit à une certaine accalmie sur le front des tarifs, les opérateurs se préoccupant surtout de la qualité de leur 4G en ces temps de télétravail généralisé. Peu conquérant, Orange n’a recruté que 357.000 clients mobiles en 2020. Bien moins que Bouygues Telecom, qui en a séduit près du double.

Quant à SFR, ses plans sociaux à répétition ternissent, semble-t-il, son image. En revanche, tous les opérateurs ont profité de la ruée des Français vers la fibre, stimulée par le succès du streaming de films sur Internet. La pandémie aura au moins eu cet effet bénéfique sur leur activité.

(Pascal SITTLER/REA)

Sport: Le grain de sel bleu

A l’instar de leur part de marché, les trois principaux équipementiers sportifs font la course en tête. C’est le résultat d’investissements marketing colossaux, notamment dans le sponsoring de sportifs tel Neymar avec Puma, de stars de la musique comme Beyoncé pour adidas, ou encore de designers iconiques tel Virgil Abloh pour Nike. « Cocorico, au pied de ce podium de multinationales surpuissantes, arrive Quechua, la marque de Decathlon, souligne Rodolphe Bonnasse, PDG de l’agence CA Com. L’allié des randonneurs qui vous fait reconnaître des Français dans une foule à l’autre bout du monde, pour peu qu’ils soient équipés d’un sac à dos… » Innovante, pratique, efficace, Quechua ne compte plus les succès commerciaux depuis la tente 2-secondes, que l’on jette en l’air pour la monter, jusqu’aux chaises de camping pliables en passant par les pulls en laine polaire pour toute la famille. Un village gaulois, parmi des géants du marketing, cela plaît aussi. « Quechua se distingue sur la notion d’utilité, détaille le consultant Philippe Guilbert, alors que Lacoste bénéficie de la confiance que lui accordent les consommateurs. » Deux leviers sensibles en temps de pandémie.

(Alyson P./Reporters-REA)

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