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Du rêve d’un « Etat juif et démocratique » à la colonisation de la Cisjordanie, que reste-t-il du sionisme ?

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Par Christophe Ayad et Louis Imbert

Publié aujourd’hui à 07h00

Tous les Israéliens connaissent l’emblème du Fonds national juif : un drapeau avec un arbre stylisé blanc sur fond vert au-dessus du sigle KKL (Keren Kayemeth LeIsrael), qui signifie littéralement « fonds pour la création d’Israël ». Ils le connaissent tous car le drapeau du KKL décore chaque site planté d’arbres par cette institution, l’une des plus anciennes du sionisme. Fondé en 1901 à Bâle, le Fonds national juif avait pour objectif d’acheter les terres du futur Etat juif. Il a contribué à la fondation, en 1909, du tout premier kibboutz, celui de Degania, près de Tel-Aviv. Pour les juifs de la diaspora, son nom évoque aussi la nostalgie des petites boîtes de métal bleues destinées à recueillir leur obole au KKL. Après la création d’Israël, en 1948, l’organisme qui lie la diaspora juive dans le monde et Israël a réorienté ses activités vers la plantation de forêts, dont celle des Martyrs, près de Jérusalem, où 6 millions d’arbres symbolisent les morts de la Shoah.

Mais le 14 février, le Fonds national juif annonçait qu’il réfléchissait à s’autoriser à acheter des terres privées palestiniennes en Cisjordanie. Coup de tonnerre dans l’histoire politique israélienne. Ce symbole d’une nation frugale de pionniers en bras de chemise pourrait devenir un agent de la colonisation des territoires occupés palestiniens. La décision pourrait n’être rendue officielle qu’après les élections législatives du 23 mars, tant le sujet est sensible. Mais déjà, plusieurs membres du conseil d’administration ont menacé de démissionner, dénonçant un geste imprudent et désastreux, qui risquait de mettre en danger « l’existence même » du KKL. La diaspora, majoritairement libérale et de gauche, acceptera-t-elle de financer les colonies au prétexte de reboiser Israël ? Un des derniers vestiges du sionisme, l’idéologie fondatrice de l’Etat juif, est-il en passe d’être absorbé par la droite messianique ?

Le portrait de Theodor Herzl, fondateur du sionisme politique, ornant le « Musée de l’Indépendance » à Tel-Aviv, le 3 mai 2018.Le portrait de Theodor Herzl, fondateur du sionisme politique, ornant le « Musée de l’Indépendance » à Tel-Aviv, le 3 mai 2018.

A dire vrai, le prestige du Fonds national juif est entamé de longue date. Il a été accusé par des historiens d’effacer les villages palestiniens abandonnés en 1948 en plantant des arbres à la place. Possédant 13 % des terres d’Israël, il investit déjà une part de ses revenus dans les territoires occupés à travers de discrètes filiales. Au grand dam de sa branche américaine, qui a coupé les ponts il y a longtemps. Sa structure mère, l’Organisation sioniste mondiale, sert quant à elle de paravent à l’administration militaire pour attribuer officieusement aux colons des terres en Cisjordanie.

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