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La Chine, un empire à l’assaut du droit de la mer

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Par Nathalie Guibert

Publié aujourd’hui à 13h09

Un destroyer de l’US Navy qui passe dans le détroit de Taïwan, début février, au nom de la « liberté de navigation ». Deux porte-avions américains qui s’exercent de conserve en mer de Chine du Sud quelques jours plus tard. Suivis par dix bombardiers chinois, lancés dans une mission fictive de frappes antinavires. Avant que l’Armée populaire de libération ne lance simultanément ses trois flottes, celles de la mer du Nord, de l’Est et du Sud, pour un mois de mars d’exercices tous azimuts…

Entre les deux grandes puissances, la saison des démonstrations de force bat son plein, comme pour marquer l’arrivée du nouveau président américain, Joe Biden, à la Maison Blanche. La guerre n’est toutefois pas à l’ordre du jour. Dans les approches de la Chine, c’est un pilier majeur de la mondialisation que les deux grands éprouvent : le droit international de la mer.

Les Etats-Unis n’ont pas signé la convention des Nations unies sur le droit de la mer adopté en 1982, à Montego Bay (Jamaïque), dont ils sont aujourd’hui les défenseurs les plus bruyants. La Chine, elle, a ratifié le texte, mais le sape chaque jour de façon plus agressive, en affirmant comme sienne la mer située à l’intérieur de la « ligne en neuf traits » – ce grand U qu’elle a dessiné unilatéralement, en 1947, et qui, depuis Taïwan, longe les Philippines, Brunei, l’Indonésie, la Malaisie et le Vietnam.

Tous ces riverains se heurtent à cette « frontière » dénuée de base légale. Elle empiète sur leurs eaux territoriales, dans lesquelles Pékin occupe nombre d’îles parmi les Spratleys et les Paracel, disputées par tous. En lançant son vaste exercice naval le 1er mars, le ministre de la défense chinois a déclaré : « Nous ne perdrons pas un pouce des terres que nous ont léguées nos ancêtres. »




Pour asseoir sa puissance montante, l’empire de Xi Jingping est devenu un Etat révisionniste du droit maritime international. L’attitude actuelle de la Chine « représente la plus grave des tentatives récentes de le violer », explique Collin Koh, un spécialiste de l’école S. Rajaratnam d’études internationales, à Singapour : « Elle cherche à tirer parti de son pouvoir militaire croissant pour contraindre les Etats côtiers de la mer de Chine du Sud à renoncer à exercer leurs droits légitimes garantis par la Convention de l’ONU, à savoir exploiter les ressources situées dans leur zone économique exclusive [ZEE]. »

A l’instar de nombreuses autres règles multilatérales, la convention de Montego Bay vit-elle ses dernières heures ? Elle est en tout cas en danger, estime, en France, Pascal Ausseur, directeur de la Fondation méditerranéenne d’études stratégiques. « La mer est longtemps restée “la chose commune”, selon le principe formulé par Grotius au XVIIsiècle, avant de ne devenir qu’une aire de transit au service du commerce des empires coloniaux européens, rappelle-t-il. Montego Bay a scellé un compromis pour une appropriation raisonnable de leurs eaux par les Etats. Mais, à présent, les puissances continentales Chine, Turquie, Russie réclament davantage. »

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